Gulzar
Footprints on Zero Line
Première partie : poèmes
Gulzar est né en 1936 à Deena, dans la région de Jhelum (alors district de l’Inde Britannique, désormais intégré au Pakistan), 11 ans avant la Partition de l’Inde. Ces 19 poèmes constituent la première partie (la seconde est un ensemble de nouvelles) de ce recueil, publié en 2017, consacré à cette plaie toujours béante entre les deux pays.
Jyoti Garin et Martine Gombert ont traduit ces poèmes. Une lecture par Jyoti Garin en français vous en est proposée, grâce à une réalisation (conception, prise de son, mixage) de Rémi Coupille (École supérieure d’art d’Aix-en-Provence).
ज़ीरो लाईन | La ligne de démarcation |
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नपे क़दमों से चलते चलते वाघा पर… मैं ज़ीरो लाईन पर आकर खड़ा था जब मेरी परछाईं पाकिस्तान में थी! मेरे पीछे था सूरज… मेरे आगे मेरे अब्बू खड़े थे मुझे देखा… छड़ी टेकी ज़मीं पर मुस्कराए और बोले ‘वहाँ जब मिट्टी छोड़ रही थी… मैं अपने घर चला आया था, पुन्नी!’ मेरे अब्बू मुझे ‘पुन्नी’ बुलाते थे ‘मुझे उम्मीद थी तुम आओगे पुन्नी, कि मेरे अंत की तुमको ख़बर पहुँची नहीं थी! यकीं था आओगे मुझको विदा करने!’ |
À pas comptés, me voici arrivé à Wagah1… Je me suis arrêté devant la ligne de démarcation, Mon ombre, elle, est retournée au Pakistan : Derrière moi, le soleil… Devant moi, debout, mon père. Il m’a vu, A posé sa canne sur le sol Et en souriant m’a dit : « Vois-tu, quand j’ai quitté mon corps, Je suis retourné à la maison, Pounni ! » (C’est ainsi que me surnommait Abbu2.) « J’avais espéré que tu viendrais, Craignant que tu n’aies reçu la nouvelle de ma mort… J’étais sûr que tu viendrais me dire adieu ! » |
बस इक वक़्फ़ा ठिठरके रह गया था छड़ी को खटखटाया फिर ज़मीं पर बढ़ाकर हाथ बोले ‘चलो दीना चलेंगे!’ मेरे अहबाब जो वाघा पे लेने आए थे मुझको पकड़के हाथ मेरा… ले गए लाहौर मुझको वहाँ के शोर-व-गुल में फिर कोई आवाज़ कानों में नहीं आई मगर सन्नाटे का इक रास्ता था जो दिखाई दे रहा था वो रास्ता ‘दीना’ जाता था… |
Tout à coup, l’instant s’est figé. À nouveau, il a frappé le sol avec sa canne, La main tendue, il m’a dit : « Viens, retournons à Dina ! » Mes amis, venus m’accueillir à Wagah, Me prirent par la main… et m’escortèrent à Lahore. Dans le brouhaha de la ville, pas une voix ne revint à mes oreilles. Seulement un sillon de silence, Et ce sillon menait à Dina… |
बहुत छोटा सा क़स्बा था, कभी वो बहुत छोटा सा गत्तों का बनाया एक स्टेशन था वहाँ सब गाड़ियाँ रुकती नहीं थीं मगर वो ‘लाम’ के दिन थे वही रुकती थीं जिनमें फ़ौजियों के डिब्बे होते थे धुआँ दिखता था गाड़ी का तो दौड़ आता स्टेशन पर उसमें अब्बू हट्टी के लिये सामान लेकर लौटा करते थे… |
À l’époque, c’était une toute petite casbah Avec une minuscule gare en carton-pâte. Tous les trains ne s’y arrêtaient pas. En ces années de « conflit » Seuls ceux bondés de soldats y faisaient halte. Dès que j’apercevais leur fumée, je filais vers la gare Pour accueillir mon père, ses bras chargés de victuailles. |
बस इक बाज़ार था इक ‘टाल्हियों’ वाली सड़क भी थी वो अब भी है मदरसा जहाँ मैं टाट की पट्टी बिछाकर तख़्ती लिखता था गली भी है… वो जिसका इक सिरा खेतों में खुलता था वो दीवारें टटोलीं, कोयले से जिन पे उर्दू लिखा करता था |
Il y avait juste un bazar, Et cette rue, plantée de majestueux banians, Est toujours là. La ruelle où, assis sur un sac de jute, je barbouillais mon ardoise d’écolier Existe encore… Elle, qui s’ouvrait sur les champs, J’en caressais les murs que, de mon fusain, je griffonnais d’ourdou. |
मुझे उम्मीद थी कोई मेरी उंगली पकड़ लेगा मुझे हिज्जे सिखाएगा मगर कोई नहीं आया… मैं शायद छोड़ आया था वहीं वाघा पे उनको मैं लौट आया… |
J’espérais que quelqu’un me tiendrait la main Et la guiderait pour tracer avec soin chaque syllabe Mais personne n’est venu… Peut-être avais-je laissé mon père derrière moi à Wagah Alors m’y voici revenu… |
मैं ज़ीरो लाईन पर आकर खड़ा हूँ मेरे पीछे मेरी परछाईं है, आवाज़ देती है वहाँ जब मिट्टी छोड़ोगे… चले आना तुम्हारा घर यहीं पर है तुम्हारी जन्म भूमि है! वतन है! |
Et me voilà, debout devant cette ligne absurde. Face à moi, mon ombre, restée dans mon passé, m’interpelle : « Où que tu sois, quand tu quitteras ce corps, Reviens, ta maison est bien ici. C’est ici que tu es né, c’est ici ta patrie ! » |
1 | Wagah (hindi: वाघा, ourdou: واەگه, punjabi : ਵਾਘਾ), à mi-chemin entre Amritsar (dans le Punjab indien) et Lahore (capitale du Punjab pakistanais), villes distantes d’environ 60km l’une de l’autre, était jusqu’à 2006 l’unique poste-frontière terrestre entre l’Inde et le Pakistan. Situé sur la ligne de démarcation mise en place par Cyril Radcliffe en 1947, ce village s’est retrouvé coupé en deux, sa partie orientale étant en Inde et sa partie occidentale au Pakistan. |
2 | Terme affectueux pour désigner le père. |
ज़ीरो लाईन | La ligne de démarcation |
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nape qadamoṃ se calate calate vāghā para… maiṃ zīro lāīna para ākara khaṛā thā jaba merī parachāīṃ pākistāna meṃ thī! mere pīche thā sūraja… mere āge mere abbū khaṛe the mujhe dekhā… chaṛī ṭekī zamīṃ para muskarāe aura bole ‘vahāṁ jaba miṭṭī choṛa rahī thī… maiṃ apane ghara calā āyā thā, punnī!’ mere abbū mujhe ‘punnī’ bulāte the ‘mujhe ummīda thī tuma āoge punnī, ki mere aṃta kī tumako khabara pahuṁcī nahīṃ thī! yakīṃ thā āoge mujhako vidā karane!’ |
À pas comptés, me voici arrivé à Wagah1… Je me suis arrêté devant la ligne de démarcation, Mon ombre, elle, est retournée au Pakistan : Derrière moi, le soleil… Devant moi, debout, mon père. Il m’a vu, A posé sa canne sur le sol Et en souriant m’a dit : « Vois-tu, quand j’ai quitté mon corps, Je suis retourné à la maison, Pounni ! » (C’est ainsi que me surnommait Abbu2.) « J’avais espéré que tu viendrais, Craignant que tu n’aies reçu la nouvelle de ma mort… J’étais sûr que tu viendrais me dire adieu ! » |
basa ika vaqfā ṭhiṭharake raha gayā thā chaṛī ko khaṭakhaṭāyā phira zamīṃ para baṛhākara hātha bole ‘calo dīnā caleṃge!’ mere ahabāba jo vāghā pe lene āe the mujhako pakaṛake hātha merā… le gae lāhaura mujhako vahāṁ ke śora-va-gula meṃ phira koī āvāza kānoṃ meṃ nahīṃ āī magara sannāṭe kā ika rāstā thā jo dikhāī de rahā thā vo rāstā ‘dīnā’ jātā thā… |
Tout à coup, l’instant s’est figé. À nouveau, il a frappé le sol avec sa canne, La main tendue, il m’a dit : « Viens, retournons à Dina ! » Mes amis, venus m’accueillir à Wagah, Me prirent par la main… et m’escortèrent à Lahore. Dans le brouhaha de la ville, pas une voix ne revint à mes oreilles. Seulement un sillon de silence, Et ce sillon menait à Dina… |
bahuta choṭā sā qasbā thā, kabhī vo bahuta choṭā sā gattoṃ kā banāyā eka sṭeśana thā vahāṁ saba gāṛiyāṁ rukatī nahīṃ thīṃ magara vo ‘lāma’ ke dina the vahī rukatī thīṃ jinameṃ faujiyoṃ ke ḍibbe hote the dhuāṁ dikhatā thā gāṛī kā to dauṛa ātā sṭeśana para usameṃ abbū haṭṭī ke liye sāmāna lekara lauṭā karate the… |
À l’époque, c’était une toute petite casbah Avec une minuscule gare en carton-pâte. Tous les trains ne s’y arrêtaient pas. En ces années de « conflit » Seuls ceux bondés de soldats y faisaient halte. Dès que j’apercevais leur fumée, je filais vers la gare Pour accueillir mon père, ses bras chargés de victuailles. |
basa ika bāzāra thā ika ‘ṭālhiyoṃ’ vālī saṛaka bhī thī vo aba bhī hai madarasā jahāṁ maiṃ ṭāṭa kī paṭṭī bichākara takhtī likhatā thā galī bhī hai… vo jisakā ika sirā khetoṃ meṃ khulatā thā vo dīvāreṃ ṭaṭolīṃ, koyale se jina pe urdū likhā karatā thā |
Il y avait juste un bazar, Et cette rue, plantée de majestueux banians, Est toujours là. La ruelle où, assis sur un sac de jute, je barbouillais mon ardoise d’écolier Existe encore… Elle, qui s’ouvrait sur les champs, J’en caressais les murs que, de mon fusain, je griffonnais d’ourdou. |
mujhe ummīda thī koī merī uṃgalī pakaṛa legā mujhe hijje sikhāegā magara koī nahīṃ āyā… maiṃ śāyada choṛa āyā thā vahīṃ vāghā pe unako maiṃ lauṭa āyā… |
J’espérais que quelqu’un me tiendrait la main Et la guiderait pour tracer avec soin chaque syllabe Mais personne n’est venu… Peut-être avais-je laissé mon père derrière moi à Wagah Alors m’y voici revenu… |
maiṃ zīro lāīna para ākara khaṛā hūṁ mere pīche merī parachāīṃ hai, āvāza detī hai vahāṁ jaba miṭṭī choṛoge… cale ānā tumhārā ghara yahīṃ para hai tumhārī janma bhūmi hai! vatana hai! |
Et me voilà, debout devant cette ligne absurde. Face à moi, mon ombre, restée dans mon passé, m’interpelle : « Où que tu sois, quand tu quitteras ce corps, Reviens, ta maison est bien ici. C’est ici que tu es né, c’est ici ta patrie ! » |
1 | Wagah (hindi: वाघा, ourdou: واەگه, punjabi : ਵਾਘਾ), à mi-chemin entre Amritsar (dans le Punjab indien) et Lahore (capitale du Punjab pakistanais), villes distantes d’environ 60km l’une de l’autre, était jusqu’à 2006 l’unique poste-frontière terrestre entre l’Inde et le Pakistan. Situé sur la ligne de démarcation mise en place par Cyril Radcliffe en 1947, ce village s’est retrouvé coupé en deux, sa partie orientale étant en Inde et sa partie occidentale au Pakistan. |
2 | Terme affectueux pour désigner le père. |
दीना | Dina |
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मैं वाघा से चला था ज़मीनों पर खिचे ख़ानों में ‘स्टैपू’ खेलता और पार करता, धुएँ की गाड़ी में ‘झेलम’ का पुल गुज़रा मैं ‘कालवाल’ से ‘मंगला’ के पीछे की तरफ निकला जहाँ ‘कुर्ला’ से लगता शहर ‘दीना’ है! वहाँ पैदा हुआ था मैं! |
J’avais quitté Wagah, Jouant à la marelle et sautant Dans les cases tracées à la craie sur le sol. Le train à vapeur a enjambé la rivière Jhelam1. À Kalval, sortant à l’arrière vers Mangla, Je me suis dirigé vers Dina2, toute proche, Ma ville natale ! |
गलियाँ खोजता, नाली में कंचे ढूँढता, लहराता तख़्ती– और गले में झूलता बस्ता लिये ठहरा था थोड़ी देर, कुक-कुक करती चक्की पर वहाँ मजमा लगा था और इक हुल्लड़ था लोगों का कि दो मेहँदी लगे दुंबों ने सींग अपने जकड़ रक्खे थे आपस में! किसी का सींग टूटेगा! मैं डरके भीड़ की टांगों के नीचे से निकल आया पक्की नीमोलियों से जेबें अपनी भर रहा था जब अचानक पेड़ पर खोई हुई गिल्ली ज़मीं पर मिल गई मुझको गिलहरी ने छुपा ली थी! |
Fouinant dans les caniveaux à la recherche de billes, Ardoise brandie, sacoche pendue au cou, Je me figeai là quelques instants, Captivé par le tic-tac sonore du moulin à blé. Là-bas, un attroupement de badauds, Foule rugissante rassemblée, Assistait au combat de deux béliers, cornes rougies par le henné. Aïe ! Une corne allait bientôt se briser. Apeuré, je m’échappai, me faufilant entre les jambes de la foule. Les poches remplies de baies de neem3 mûres, J’ai soudain aperçu le guilli4 que j’avais lancé sur l’arbre, tout là-haut, Et qui était retombé sur le sol, Malice d’écureuil peut-être… |
गली का मोड़ मुड़ते ही मेरा घर था बहुत डर-डरके दरवाज़े पे दस्तक दी किसी बूढ़े ने ज़ंग आलूद दरवाज़ा धकेला बड़ी हैरत से देखा मुझको बूढ़े ने मेरा हम-शक्ल लगता था! मैं बस्ता रखके लौट आया ‘मैं फिर आऊंगा’, ये कहकर ‘दुंबों की लड़ाई देखने जाता हूँ… मैं पिछली गली में हूँ !’ |
Juste à l’angle de la ruelle, ma maison. Timide et craintif, je frappai. Ouvrant la porte rouillée, perplexe, Un homme vénérable m’a dévisagé. « Tiens, mon sosie ! » Posant en toute hâte ma sacoche, je détalai Lui criant : « Je reviendrai ! Je retourne voir le combat de béliers Juste une ruelle plus loin… » |
1 | Le margousier (Azadirachta indica), ou neem, est un arbre originaire d’Inde appartenant à la famille des Meliaceae. Ses fruits et ses graines sont la source de l’huile de neem. |
2 | Dina (en ourdou : دینہ) est une ville pakistanaise, située dans le district de Jhelum dans le nord de la province du Punjab. Elle est aussi la capitale du tehsil (subdivision administrative) du même nom. |
3 | Le margousier (Azadirachta indica), ou neem, est un arbre originaire d’Inde appartenant à la famille des Meliaceae. Ses fruits et ses graines sont la source de l’huile de neem. |
4 | Jeu traditionnel de dextérité en Inde, souvent cité par Gulzar. On y joue dans les rues ou dans un terrain vague. Il faut 2 bâtons de tailles différentes. On utilise le grand bâton (danda) pour propulser le petit (guilli) qui repose au sol, puis le frapper avant qu’il ne retombe. |
dīnā | Dina |
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maiṃ vāghā se calā thā zamīnoṃ para khice khānoṃ meṃ ‘sṭaipū’ khelatā aura pāra karatā, dhueṁ kī gāṛī meṃ ‘jhelama’ kā pula guzarā maiṃ ‘kālavāla’ se ‘maṃgalā’ ke pīche kī tarapha nikalā jahāṁ ‘kurlā’ se lagatā śahara ‘dīnā’ hai! vahāṁ paidā huā thā maiṃ! |
J’avais quitté Wagah, Jouant à la marelle et sautant Dans les cases tracées à la craie sur le sol. Le train à vapeur a enjambé la rivière Jhelam1. À Kalval, sortant à l’arrière vers Mangla, Je me suis dirigé vers Dina2, toute proche, Ma ville natale ! |
galiyāṁ khojatā, nālī meṃ kaṃce ḍhūṁḍhatā, laharātā takhtī– aura gale meṃ jhūlatā bastā liye ṭhaharā thā thoṛī dera, kuka-kuka karatī cakkī para vahāṁ majamā lagā thā aura ika hullaḍa thā logoṃ kā ki do mehaṁdī lage duṃboṃ ne sīṃga apane jakaṛa rakkhe the āpasa meṃ! kisī kā sīṃga ṭūṭegā! maiṃ ḍarake bhīṛa kī ṭāṃgoṃ ke nīce se nikala āyā pakkī nīmoliyoṃ se jebeṃ apanī bhara rahā thā jaba acānaka peṛa para khoī huī gillī zamīṃ para mila gaī mujhako gilaharī ne chupā lī thī! |
Fouinant dans les caniveaux à la recherche de billes, Ardoise brandie, sacoche pendue au cou, Je me figeai là quelques instants, Captivé par le tic-tac sonore du moulin à blé. Là-bas, un attroupement de badauds, Foule rugissante rassemblée, Assistait au combat de deux béliers, cornes rougies par le henné. Aïe ! Une corne allait bientôt se briser. Apeuré, je m’échappai, me faufilant entre les jambes de la foule. Les poches remplies de baies de neem3 mûres, J’ai soudain aperçu le guilli4 que j’avais lancé sur l’arbre, tout là-haut, Et qui était retombé sur le sol, Malice d’écureuil peut-être… |
galī kā moṛa muṛate hī merā ghara thā bahuta ḍara-ḍarake daravāze pe dastaka dī kisī būṛhe ne ja़ṃga ālūda daravāzā dhakelā baṛī hairata se dekhā mujhako būṛhe ne merā hama-śakla lagatā thā! maiṃ bastā rakhake lauṭa āyā ‘maiṃ phira āūṃgā’, ye kahakara ‘duṃboṃ kī laṛāī dekhane jātā hūṁ… maiṃ pichalī galī meṃ hūṁ !’ |
Juste à l’angle de la ruelle, ma maison. Timide et craintif, je frappai. Ouvrant la porte rouillée, perplexe, Un homme vénérable m’a dévisagé. « Tiens, mon sosie ! » Posant en toute hâte ma sacoche, je détalai Lui criant : « Je reviendrai ! Je retourne voir le combat de béliers Juste une ruelle plus loin… » |
1 | Le margousier (Azadirachta indica), ou neem, est un arbre originaire d’Inde appartenant à la famille des Meliaceae. Ses fruits et ses graines sont la source de l’huile de neem. |
2 | Dina (en ourdou : دینہ) est une ville pakistanaise, située dans le district de Jhelum dans le nord de la province du Punjab. Elle est aussi la capitale du tehsil (subdivision administrative) du même nom. |
3 | Le margousier (Azadirachta indica), ou neem, est un arbre originaire d’Inde appartenant à la famille des Meliaceae. Ses fruits et ses graines sont la source de l’huile de neem. |
4 | Jeu traditionnel de dextérité en Inde, souvent cité par Gulzar. On y joue dans les rues ou dans un terrain vague. Il faut 2 bâtons de tailles différentes. On utilise le grand bâton (danda) pour propulser le petit (guilli) qui repose au sol, puis le frapper avant qu’il ne retombe. |
दीना में… | À Dina… |
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बड़ी सी एक लड़की थी मेरा बस्ता पकड़के, और दरवाज़े के पीछे खींचकर मुझको मेरे बस्ते से इस ने गाचनी मिट्टी चुराई थी कुतरके दाँत से वो मुस्कराई थी! मेरे गालों पे पप्पी लेके बोली थी ‘मुझे दे दे ये मिट्टी! मुझको तख़्ती पोतकर इक नाम लिखना है।’ ‘वो कोई हामला होगी!’ मुझे माँ ने बताया था! |
C’était une fille élancée. Elle me tira derrière la porte, agrippant ma sacoche, En extirpa le morceau d’argile1 Le dévora à pleines dents, me sourit, Et, après un vigoureux baiser sur mes joues, me dit : « Donne-moi cette argile ! Je dois l’étaler sur mon ardoise pour y inscrire un nom. » « Elle doit être enceinte2 ! », analysa Maman. |
मैं शायद छे बरस का था मैं अब छप्पन बरस का हूँ मैं अब भी हामला हूँ याद से उस की वो लड़की अब भी मुझको याद आती है! |
J’avais alors sans doute six ans, J’en ai désormais cinquante-six… C’est comme si j’étais « enceint » de sa mémoire : Cette fille me hante encore aujourd’hui ! |
1 | ‘Multān earth’ : argile ocreuse. |
2 | Désir insatiable de la femme enceinte. |
dīnā meṃ… | À Dina… |
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baṛī sī eka laṛakī thī merā bastā pakaṛake, aura daravāze ke pīche khīṃcakara mujhako mere baste se isa ne gācanī miṭṭī curāī thī kutarake dāṁta se vo muskarāī thī! mere gāloṃ pe pappī leke bolī thī ‘mujhe de de ye miṭṭī! mujhako takhtī potakara ika nāma likhanā hai।’ ‘vo koī hāmalā hogī!’ mujhe māṁ ne batāyā thā! |
C’était une fille élancée. Elle me tira derrière la porte, agrippant ma sacoche, En extirpa le morceau d’argile1 Le dévora à pleines dents, me sourit, Et, après un vigoureux baiser sur mes joues, me dit : « Donne-moi cette argile ! Je dois l’étaler sur mon ardoise pour y inscrire un nom. » « Elle doit être enceinte2 ! », analysa Maman. |
maiṃ śāyada che barasa kā thā maiṃ aba chappana barasa kā hūṁ maiṃ aba bhī hāmalā hūṁ yāda se usa kī vo laṛakī aba bhī mujhako yāda ātī hai! |
J’avais alors sans doute six ans, J’en ai désormais cinquante-six… C’est comme si j’étais « enceint » de sa mémoire : Cette fille me hante encore aujourd’hui ! |
1 | ‘Multān earth’ : argile ocreuse. |
2 | Désir insatiable de la femme enceinte. |
धय्या1 | 1-2-3 soleil ! |
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सत्तर साल लगे हैं मुझको ‘दीना’ वापस आकर धय्या छूने में कितना दौड़ा हूँ मैं वक़्त के वीराने में कितनी लम्बी आँख मिचोली खेली है! |
Il m’a fallu soixante-dix ans Pour retourner à Dina et rejouer à ce jeu. Ah, quelle course effrénée dans le désert du temps, Quelle longue partie de cache-cache ! |
हुत दिनों की चिपकी हुई तस्वीर थी एक स्टेशन की कुछ बीच हवा में ठहरा हुआ इंजन का धुआँ पीली पड़ने लगी थी अब रंगत उसकी ट्रेन के इक दरवाज़े में जो खड़े थे, मेरे अब्बू थे दीवारों से चिपकी हुई तस्वीर प्लास्तर छोड़ रही थी, जब धय्या पर पहुँचा मैं बोर्ड तो है स्टेशन पर अब भी नाम भी है… सीने पर लिखा रहता था पहले उसके अब लगता है जैसे बोर्ड की पीठ पे लिखा है उसके पीछे दूर तलक बेसुध पड़ी है रेल की पटरी! |
Une vieille photo de la gare plaquée sur un mur, La fumée d’une locomotive figée dans l’air… Ses couleurs s’estompaient alors peu à peu À une portière du train, tiens, voilà papa ! La photo collée sur le mur se décolorait. Quand j’ai retrouvé l’aire de jeu Le panneau de la gare était toujours là, Avec son nom… À l’époque, c’était la poitrine de la gare qui l’arborait. Maintenant, on dirait qu’il est fiché sur son dos ! Derrière lui, s’étire la voie ferrée jusqu’à l’horizon. |
माज़ी की ख़ामोश फिल्म से गुज़र रहा था गली जहाँ से निकला था मैं वहीं पड़ी है जैसे मेरी कैंचली रखी हो सत्तर साल में कुक-कुक करते-करते पन-चक्की का गला भी सूख गया रेत के अंदर जाकर बैठ गया है पानी मुँह खोले बैठा है कुआँ |
Mon passé défilait comme un film muet… La ruelle où je suis né Est toujours là, on dirait ma mue qui serpente. Au cours de ces soixante-dix ans, À force de cliqueter, les becs de la roue à eau sont à sec L’eau s’est infiltrée profondément dans le sable Et le puits est là, gouffre béant de soif. |
‘दाता चौक’ के आगे इक तालाब था पहले आसमान सीने पे रखके लेटा रहता था उसने भी आँखें बंद कर लीं आँखों में मिट्टी भर ली है |
Devant Data Chowk, il y avait autrefois un étang Qui se couchait toujours, le ciel posé sur la poitrine. Ses yeux sont désormais clos, Recouverts de terre. |
मेरा मदरसा प्राईम्री था टाट बिछाकर, धूप में ‘केदा’ पढ़ता था अब हाई स्कूल है बेंच लगे हैं! |
L’école primaire, medersa, Où, assis par terre sur un sac de toile, au soleil, je lisais l’abécédaire Est dorénavant un lycée Avec des bancs ! |
छद्रा सा इक पेड़ खड़ा है दूर ज़रा वहीं कहीं ‘मुर्गा’ बनवाकर खड़ा किया करता था मास्टर बूढ़ा पेड़ वहीं से झुककर पहचानने की कोशिश करता है ‘वही तो हो तुम…!’ हम दोनों कहना चाहते हैं? |
Un peu plus loin se dresse un arbre lacéré. C’est dans ce coin-là que le maître m’infligeait la punition du coq2. De là-haut, le vieil arbre se penche Et tente de me reconnaître : « C’est bien toi, n’est-ce pas… ? » Nos questionnements se font écho. |
कैसे वीरान हो जाते हैं साल पुराने वीरान हो जाता है बचपन फिर भी एक महक रह जाती है सीलन की तह ख़ानों में उतरो तो… तह ख़ानों में नींद सी आने लगती है! |
Comme les années passées semblent désertes, Tout comme notre enfance. Pourtant cette odeur d’humidité persiste Tandis qu’on descend dans les sous-sols… Où la somnolence vous gagne ! |
1 | धय्या (en ourdou : دھیا), est jeu qui ressemble à 1-2-3 soleil ! Mais il s’agit ici de toucher un lieu déterminé (pas nécessairement le mur face à la sentinelle) et de retourner en courant. |
2 | Faire accroupir un enfant dans la position du coq en guise de punition. |
dhayyā1 | 1-2-3 soleil ! |
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sattara sāla lage haiṃ mujhako ‘dīnā’ vāpasa ākara dhayyā chūne meṃ kitanā dauṛā hūṁ maiṃ vaqta ke vīrāne meṃ kitanī lambī āṁkha micolī khelī hai! |
Il m’a fallu soixante-dix ans Pour retourner à Dina et rejouer à ce jeu. Ah, quelle course effrénée dans le désert du temps, Quelle longue partie de cache-cache ! |
huta dinoṃ kī cipakī huī tasvīra thī eka sṭeśana kī kucha bīca havā meṃ ṭhaharā huā iṃjana kā dhuāṁ pīlī paṛane lagī thī aba raṃgata usakī ṭrena ke ika daravāze meṃ jo khaṛe the, mere abbū the dīvāroṃ se cipakī huī tasvīra plāstara choṛa rahī thī, jaba dhayyā para pahuṁcā maiṃ borḍa to hai sṭeśana para aba bhī nāma bhī hai… sīne para likhā rahatā thā pahale usake aba lagatā hai jaise borḍa kī pīṭha pe likhā hai usake pīche dūra talaka besudha paṛī hai rela kī paṭarī! |
Une vieille photo de la gare plaquée sur un mur, La fumée d’une locomotive figée dans l’air… Ses couleurs s’estompaient alors peu à peu À une portière du train, tiens, voilà papa ! La photo collée sur le mur se décolorait. Quand j’ai retrouvé l’aire de jeu Le panneau de la gare était toujours là, Avec son nom… À l’époque, c’était la poitrine de la gare qui l’arborait. Maintenant, on dirait qu’il est fiché sur son dos ! Derrière lui, s’étire la voie ferrée jusqu’à l’horizon. |
māzī kī khāmośa philma se guzara rahā thā galī jahāṁ se nikalā thā maiṃ vahīṃ paṛī hai jaise merī kaiṃcalī rakhī ho sattara sāla meṃ kuka-kuka karate-karate pana-cakkī kā galā bhī sūkha gayā reta ke aṃdara jākara baiṭha gayā hai pānī muṁha khole baiṭhā hai kuāṁ |
Mon passé défilait comme un film muet… La ruelle où je suis né Est toujours là, on dirait ma mue qui serpente. Au cours de ces soixante-dix ans, À force de cliqueter, les becs de la roue à eau sont à sec L’eau s’est infiltrée profondément dans le sable Et le puits est là, gouffre béant de soif. |
‘dātā cauka’ ke āge ika tālāba thā pahale āsamāna sīne pe rakhake leṭā rahatā thā usane bhī āṁkheṃ baṃda kara līṃ āṁkhoṃ meṃ miṭṭī bhara lī hai |
Devant Data Chowk, il y avait autrefois un étang Qui se couchait toujours, le ciel posé sur la poitrine. Ses yeux sont désormais clos, Recouverts de terre. |
merā madarasā prāīmrī thā ṭāṭa bichākara, dhūpa meṃ ‘kedā’ paṛhatā thā aba hāī skūla hai beṃca lage haiṃ! |
L’école primaire, medersa, Où, assis par terre sur un sac de toile, au soleil, je lisais l’abécédaire Est dorénavant un lycée Avec des bancs ! |
chadrā sā ika peṛa khaṛā hai dūra zarā vahīṃ kahīṃ ‘murgā’ banavākara khaṛā kiyā karatā thā māsṭara būṛhā peṛa vahīṃ se jhukakara pahacānane kī kośiśa karatā hai ‘vahī to ho tuma…!’ hama donoṃ kahanā cāhate haiṃ? |
Un peu plus loin se dresse un arbre lacéré. C’est dans ce coin-là que le maître m’infligeait la punition du coq2. De là-haut, le vieil arbre se penche Et tente de me reconnaître : « C’est bien toi, n’est-ce pas… ? » Nos questionnements se font écho. |
kaise vīrāna ho jāte haiṃ sāla purāne vīrāna ho jātā hai bacapana phira bhī eka mahaka raha jātī hai sīlana kī taha khānoṃ meṃ utaro to… taha khānoṃ meṃ nīṃda sī āne lagatī hai! |
Comme les années passées semblent désertes, Tout comme notre enfance. Pourtant cette odeur d’humidité persiste Tandis qu’on descend dans les sous-sols… Où la somnolence vous gagne ! |
1 | धय्या (en ourdou : دھیا), est jeu qui ressemble à 1-2-3 soleil ! Mais il s’agit ici de toucher un lieu déterminé (pas nécessairement le mur face à la sentinelle) et de retourner en courant. |
2 | Faire accroupir un enfant dans la position du coq en guise de punition. |
एक ही चक्कर लेता है चक्की पर रखा उम्र का चाक! | Sur la meule, le temps ne fait qu’un tour. |
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एक ही चक्कर लेता है चक्की पर रखा उम्र का चाक एक ही चक्कर में सारा कुछ पिस जाता है |
Le temps ne fait qu’un tour sur la meule, Écrasant tout sur son passage. |
एक हयाती में जो कुछ भी हासिल हो सब कुछ जमा करना और उँडेलते रहना चाक में नो-उम्री के पत्थर, पिट्ठू, कंचे, कंकड़, इल्म, तजुरबे और नसीहतें जितनी बटोरी हों शौक़ ने जितने उफ़क़ चुने हों चलते-चलते खेत दिनों के काटे जितने तारों भरी रातों के बाग़ उतारे जो सब भी डाल दिये चाक के अन्दर |
Tout ce que j’ai pu glaner en une vie, Je l’ai versé continûment dans cette roue ! Galets, palets, billes et cailloux d’enfance, Connaissances, expériences, conseils, Tous les horizons désirés au fil de l’eau, Les champs des journées moissonnées, Les jardins des nuits étoilées, La meule les a tous happés. |
रात और दिन की तस्बीहें अब टूट रही हैं इक बालिश्त हिस्सा बाक़ी है उम्र का शायद! |
Les grains des chapelets des jours qui passent se brisent à présent. Peut-être ne me reste-t-il à vivre qu’une largeur de main… |
लौट रहा हूँ ‘दीना’ जहाँ से चाक चला था! | Je retourne à Dina où la meule avait commencé son tour ! |
eka hī cakkara letā hai cakkī para rakhā umra kā cāka! | Sur la meule, le temps ne fait qu’un tour. |
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eka hī cakkara letā hai cakkī para rakhā umra kā cāka eka hī cakkara meṃ sārā kucha pisa jātā hai |
Le temps ne fait qu’un tour sur la meule, Écrasant tout sur son passage. |
eka hayātī meṃ jo kucha bhī hāsila ho saba kucha jamā karanā aura uṁḍelate rahanā cāka meṃ no-umrī ke patthara, piṭṭhū, kaṃce, kaṃkaṛa, ilma, tajurabe aura nasīhateṃ jitanī baṭorī hoṃ śauqa ne jitane ufaqa cune hoṃ calate-calate kheta dinoṃ ke kāṭe jitane tāroṃ bharī rātoṃ ke bāga utāre jo saba bhī ḍāla diye cāka ke andara |
Tout ce que j’ai pu glaner en une vie, Je l’ai versé continûment dans cette roue ! Galets, palets, billes et cailloux d’enfance, Connaissances, expériences, conseils, Tous les horizons désirés au fil de l’eau, Les champs des journées moissonnées, Les jardins des nuits étoilées, La meule les a tous happés. |
rāta aura dina kī tasbīheṃ aba ṭūṭa rahī haiṃ ika bāliśta hissā bāqī hai umra kā śāyada! |
Les grains des chapelets des jours qui passent se brisent à présent. Peut-être ne me reste-t-il à vivre qu’une largeur de main… |
lauṭa rahā hūṁ ‘dīnā’ jahāṁ se cāka calā thā! | Je retourne à Dina où la meule avait commencé son tour ! |
अगर ऐसा भी हो सकता… | S’il était possible… |
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अगर ऐसा भी हो सकता… तुम्हारी नींद में सब ख़्वाब अपने मुन्तक़िल करके तुम्हें वो सब दिखा सकता, जो मैं ख़्वाबों में अकसर देखा करता हूँ! |
S’il était possible De transporter mes rêves dans ton sommeil, Et de te montrer tout ce que j’y vois… |
ये हो सकता अगर मुमकिन तुम्हें मालूम हो जाता तुम्हें मैं ले गया था, सरहदों के पार दीना में तुम्हें वो घर दिखाया था-जहाँ पैदा हुआ था मैं जहाँ छत पर लगा सरियों का जंगला, धूप से दिन भर मेरे आँगन में शतरंजी बनाता था मिटाता था |
Si cela était possible, Alors tu saurais… Je t’ai emmenée au-delà des frontières, à Dina, Je t’ai montré la maison où je suis né Où, toute la journée, à travers le treillage du toit, la lumière du soleil Dessine un échiquier dans la cour, puis en efface les traces. |
दिखाई थीं तुम्हें वो खेतियाँ सरसों की, दीना में, कि जिसके पीले-पीले फूल तुम को ख़्वाब में कच्चे खिलाए थे वहीं इक रास्ता था ‘टहलियों’ का, जिस पे मीलों तक पड़ा करते थे झूले सौंधे सावन के उसी की सौंधी ख़ुशबू से, महक उठती हैं आँखें जब कभी इस ख़्वाब से गुज़रूँ |
Je t’ai montré ces champs de moutarde à Dina, Dont je t’ai fait goûter dans mon rêve les fleurs fraîches dorées. Juste là, longeant une allée bordée de banians, se succédaient à perte de vue Les balançoires des printemps humides… L’odeur et la fraîcheur de cette douce pluie parfument mes yeux À chaque fois que ce rêve m’habite. |
तुम्हें रहतास का चलता कुआँ भी तो दिखाया था किले में बन्द रहता था जो दिन भर, रात को गाँव में आ जाता था कहते हैं… |
Je t’ai aussi montré le puits de Rohtas1, toujours là, Celui qui, prisonnier du fort le jour, s’évadait dans le village toute la nuit, Comme la rumeur le murmure… |
तुम्हें काला से कालवाल तक लेकर उड़ा हूँ मैं तुम्हें दरिया-ए-झेलम पर अजब मंज़र दिखाए थे जहाँ तरबूज़ पर लेटे हुए तैराक लड़के बहते रहते थे जहाँ तगड़े से इक सरदार की पगड़ी पकड़कर मैं नहाता, डुबकियाँ लेता, मगर जब गोता आ जाता तो मेरी नींद खुल जाती |
De Kala à Kalowal, survolant la rivière Jhelum avec toi, Je t’ai montré de merveilleux paysages aériens, De jeunes nageurs allongés sur des pastèques flottant sur l’eau. M’agrippant au turban d’un robuste sardar2, je m’y baignais, Piquais quelques plongeons mais, emporté par quelque courant impétueux, me réveillais en sursaut. |
मगर ये सिर्फ़ ख़्वाबों ही में मुमकिन है वहाँ जाने में अब दुश्वारियाँ हैं कुछ सियासत की वतन अब भी वही है, पर नहीं है मुल्क अब मेरा वहाँ जाना हो अब तो दो-दो सरकारों के दसों दफ़तरों से शकल पर लगवाके मुहरें ख़्वाब साबित करने पड़ते है। |
Mais tout cela n’est possible que dans les rêves. Maintenant, pour s’y rendre, on se heurte à des écueils politiques. C’est toujours ma patrie, ce n’est désormais plus mon pays. Pour s’y rendre, il faut passer par des dizaines de bureaux des deux gouvernements, Se faire estampiller le visage pour fournir la preuve de ses rêves… |
1 | Le fort de Rohtas (en ourdou : قلعہ روہتاس), est un fort de garnison construit par le roi afghan Sher Shâh Sûrî au xve siècle. C’est le premier exemple d’un mélange réussi entre les architectures hindoues, afghanes et perses dans le sous-continent indien. |
2 | Terme utilisé dans le sikhisme, historiquement, pour désigner un chef de bataillon. Il vient du perse : sar, la tête, et dar, dérivé du verbe tenir. Aujourd’hui, ce mot correspond à chef, ou directeur. Ce mot est d’une connotation plus hiérarchique que baba, qui traduit le respect. |
agara aisā bhī ho sakatā… | S’il était possible… |
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agara aisā bhī ho sakatā… tumhārī nīṃda meṃ saba khvāba apane muntaqila karake tumheṃ vo saba dikhā sakatā, jo maiṃ khvāboṃ meṃ akasara dekhā karatā hūṁ! |
S’il était possible De transporter mes rêves dans ton sommeil, Et de te montrer tout ce que j’y vois… |
ye ho sakatā agara mumakina tumheṃ mālūma ho jātā tumheṃ maiṃ le gayā thā, sarahadoṃ ke pāra dīnā meṃ tumheṃ vo ghara dikhāyā thā-jahāṁ paidā huā thā maiṃ jahāṁ chata para lagā sariyoṃ kā jaṃgalā, dhūpa se dina bhara mere āṁgana meṃ śataraṃjī banātā thā miṭātā thā |
Si cela était possible, Alors tu saurais… Je t’ai emmenée au-delà des frontières, à Dina, Je t’ai montré la maison où je suis né Où, toute la journée, à travers le treillage du toit, la lumière du soleil Dessine un échiquier dans la cour, puis en efface les traces. |
dikhāī thīṃ tumheṃ vo khetiyāṁ sarasoṃ kī, dīnā meṃ, ki jisake pīle-pīle phūla tuma ko khvāba meṃ kacce khilāe the vahīṃ ika rāstā thā ‘ṭahaliyoṃ’ kā, jisa pe mīloṃ taka paṛā karate the jhūle sauṃdhe sāvana ke usī kī sauṃdhī khuśabū se, mahaka uṭhatī haiṃ āṁkheṃ jaba kabhī isa khvāba se guzarūṁ |
Je t’ai montré ces champs de moutarde à Dina, Dont je t’ai fait goûter dans mon rêve les fleurs fraîches dorées. Juste là, longeant une allée bordée de banians, se succédaient à perte de vue Les balançoires des printemps humides… L’odeur et la fraîcheur de cette douce pluie parfument mes yeux À chaque fois que ce rêve m’habite. |
tumheṃ rahatāsa kā calatā kuāṁ bhī to dikhāyā thā kile meṃ banda rahatā thā jo dina bhara, rāta ko gāṁva meṃ ā jātā thā kahate haiṃ… |
Je t’ai aussi montré le puits de Rohtas1, toujours là, Celui qui, prisonnier du fort le jour, s’évadait dans le village toute la nuit, Comme la rumeur le murmure… |
tumheṃ kālā se kālavāla taka lekara uṛā hūṁ maiṃ tumheṃ dariyā-e-jhelama para ajaba maṃzara dikhāe the jahāṁ tarabūza para leṭe hue tairāka laṛake bahate rahate the jahāṁ tagaṛe se ika saradāra kī pagaṛī pakaṛakara maiṃ nahātā, ḍubakiyāṁ letā, magara jaba gotā ā jātā to merī nīṃda khula jātī |
De Kala à Kalowal, survolant la rivière Jhelum avec toi, Je t’ai montré de merveilleux paysages aériens, De jeunes nageurs allongés sur des pastèques flottant sur l’eau. M’agrippant au turban d’un robuste sardar2, je m’y baignais, Piquais quelques plongeons mais, emporté par quelque courant impétueux, me réveillais en sursaut. |
magara ye sirfa khvāboṃ hī meṃ mumakina hai vahāṁ jāne meṃ aba duśvāriyāṁ haiṃ kucha siyāsata kī vatana aba bhī vahī hai, para nahīṃ hai mulka aba merā vahāṁ jānā ho aba to do-do sarakāroṃ ke dasoṃ dafataroṃ se śakala para lagavāke muhareṃ khvāba sābita karane paṛate hai। |
Mais tout cela n’est possible que dans les rêves. Maintenant, pour s’y rendre, on se heurte à des écueils politiques. C’est toujours ma patrie, ce n’est désormais plus mon pays. Pour s’y rendre, il faut passer par des dizaines de bureaux des deux gouvernements, Se faire estampiller le visage pour fournir la preuve de ses rêves… |
1 | Le fort de Rohtas (en ourdou : قلعہ روہتاس), est un fort de garnison construit par le roi afghan Sher Shâh Sûrî au xve siècle. C’est le premier exemple d’un mélange réussi entre les architectures hindoues, afghanes et perses dans le sous-continent indien. |
2 | Terme utilisé dans le sikhisme, historiquement, pour désigner un chef de bataillon. Il vient du perse : sar, la tête, et dar, dérivé du verbe tenir. Aujourd’hui, ce mot correspond à chef, ou directeur. Ce mot est d’une connotation plus hiérarchique que baba, qui traduit le respect. |
दस्तक | On frappe à la porte |
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सुबह-सुबह इक ख़्वाब की दस्तक पर दरवाज़ा खोला, देखा सरहद के उस पार से कुछ मेहमान आए हैं आँखों से मानूस थे सारे चेहरे सारे सुने सुनाए |
De bon matin, j’ai ouvert à un songe qui frappait à ma porte, et j’ai vu Des hôtes venus de l’autre côté de la frontière. Je les connaissais tous de vue, Leurs visages m’étaient familiers. |
पाँव धोए, हाथ धुलाए आँगन में आसन लगवाए और तन्नूर पे मक्कई के कुछ मोटे-मोटे रोट पकाए पोटली में मेहमान मेरे पिछले सालों की फ़सलों का गुड़ लाए थे |
Je leur ai lavé les pieds, offert l’eau pour se laver les mains, Présenté un siège dans la cour, Puis de gros pains de maïs furent cuits dans le four tandoor. Dans un balluchon, mes hôtes Avaient apporté des pains de sucre de palme, récoltes des années précédentes. |
आँख खुली तो देखा घर में कोई नहीं था हाथ लगाकर देखा तो तन्नूर अभी तक बुझा नहीं था और होंठों पर मीठे गुड़ का ज़ायक़ा अब तक चिपक रहा था |
Lorsque j’ai ouvert les yeux, il n’y avait personne dans la maison. J’ai touché le four tandoor : il était encore tout chaud Et mes lèvres, toutes collantes, gardaient la douce saveur du pain de sucre. |
ख़्वाब था शायद! ख़्वाब ही होगा! |
C’était peut-être un songe… C’était sûrement un songe ! |
सरहद पर कल रात, सुना है, चली थी गोली सरहद पर कल रात, सुना है कुछ ख़्वाबों का ख़ून हुआ था! |
À la frontière, la nuit dernière, il paraît qu’on entendait le crépitement d’une fusillade, À la frontière, la nuit dernière, il paraît Que des songes ont été foudroyés ! |
dastaka | On frappe à la porte |
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subaha-subaha ika khvāba kī dastaka para daravāzā kholā, dekhā sarahada ke usa pāra se kucha mehamāna āe haiṃ āṁkhoṃ se mānūsa the sāre cehare sāre sune sunāe |
De bon matin, j’ai ouvert à un songe qui frappait à ma porte, et j’ai vu Des hôtes venus de l’autre côté de la frontière. Je les connaissais tous de vue, Leurs visages m’étaient familiers. |
pāṁva dhoe, hātha dhulāe āṁgana meṃ āsana lagavāe aura tannūra pe makkaī ke kucha moṭe-moṭe roṭa pakāe poṭalī meṃ mehamāna mere pichale sāloṃ kī fasaloṃ kā guḍa lāe the |
Je leur ai lavé les pieds, offert l’eau pour se laver les mains, Présenté un siège dans la cour, Puis de gros pains de maïs furent cuits dans le four tandoor. Dans un balluchon, mes hôtes Avaient apporté des pains de sucre de palme, récoltes des années précédentes. |
āṁkha khulī to dekhā ghara meṃ koī nahīṃ thā hātha lagākara dekhā to tannūra abhī taka bujhā nahīṃ thā aura hoṃṭhoṃ para mīṭhe guḍa kā zāyaqā aba taka cipaka rahā thā |
Lorsque j’ai ouvert les yeux, il n’y avait personne dans la maison. J’ai touché le four tandoor : il était encore tout chaud Et mes lèvres, toutes collantes, gardaient la douce saveur du pain de sucre. |
khvāba thā śāyada! khvāba hī hogā! |
C’était peut-être un songe… C’était sûrement un songe ! |
sarahada para kala rāta, sunā hai, calī thī golī sarahada para kala rāta, sunā hai kucha khvāboṃ kā khūna huā thā! |
À la frontière, la nuit dernière, il paraît qu’on entendait le crépitement d’une fusillade, À la frontière, la nuit dernière, il paraît Que des songes ont été foudroyés ! |
دستک | On frappe à la porte |
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صبح صبح اک خواب کی دستک پر دروازہ کھولا' دیکھا سرحد کے اس پار سے کچھ مہمان آئے ہیں آنکھوں سے مانوس تھے سارے چہرے سارے سنے سنائے |
De bon matin, j’ai ouvert à un songe qui frappait à ma porte, et j’ai vu Des hôtes venus de l’autre côté de la frontière. Je les connaissais tous de vue, Leurs visages m’étaient familiers. |
پاؤں دھوئے، ہاتھ دھلائے آنگن میں آسن لگوائے اور تنور پہ مکی کے کچھ موٹے موٹے روٹ پکائے پوٹلی میں مہمان مرے پچھلے سالوں کی فصلوں کا گڑ لائے تھے |
Je leur ai lavé les pieds, offert l’eau pour se laver les mains, Présenté un siège dans la cour, Puis de gros pains de maïs furent cuits dans le four tandoor. Dans un balluchon, mes hôtes Avaient apporté des pains de sucre de palme, récoltes des années précédentes. |
آنکھ کھلی تو دیکھا گھر میں کوئی نہیں تھا ہاتھ لگا کر دیکھا تو تنور ابھی تک بجھا نہیں تھا اور ہونٹوں پر میٹھے گڑ کا ذائقہ اب تک چپک رہا تھا |
Lorsque j’ai ouvert les yeux, il n’y avait personne dans la maison. J’ai touché le four tandoor : il était encore tout chaud Et mes lèvres, toutes collantes, gardaient la douce saveur du pain de sucre. |
خواب تھا شاید! خواب ہی ہوگا! |
C’était peut-être un songe… C’était sûrement un songe ! |
سرحد پر کل رات، سنا ہے ،چلی تھی گولی سرحد پر کل رات، سنا ہے کچھ خوابوں کا خون ہوا تھا! |
À la frontière, la nuit dernière, il paraît qu’on entendait le crépitement d’une fusillade, À la frontière, la nuit dernière, il paraît Que des songes ont été foudroyés ! |
भमेरी | Moulin à vent |
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हम सब भाग रहे थे रेफ्यूजी थे माँ ने जितने ज़ेवर थे, सब पहन लिये थे बाँध लिये थे छोटी मुझे से – छह सालों की दूध पिलाके, ख़ूब खिलाके, साथ लिया था मैंने अपनी एक ‘भमेरी’ और इक ‘लाटू’ पाजामे में उड़स लिया था रात की रात हम गाँव छोड़कर भाग रहे थे रेफ्यूजी थे |
Nous fuyions tous, Nous, les réfugiés. Maman portait sur elle tous les bijoux qu’elle possédait. Elle tenait fermement Tchhoti, ma sœur de six ans ma cadette, Après lui avoir donné à manger et à boire du lait. Moi, j’avais caché un moulin à vent et une toupie Dans mon pyjama. À la faveur des ombres de la nuit, délaissant le village, nous fuyions, Nous, les réfugiés. |
आग धुएँ और चीख़ पुकार के जंगल से गुज़रे थे सारे हम सब-के-सब घोर धुएँ में भाग रहे थे हाथ किसी आँधी की आँतें फाड़ रहे थे आँखें अपने जबड़े खोले भोंक रही थीं माँ ने दौड़ते-दौड़ते ख़ून की क़ै कर दी थी |
Nous nous frayions un chemin dans une jungle de feu, de fumée et de cris, Tous ensemble, en masse, nous fuyions à travers une fumée opaque. Des mains déchiraient les entrailles de la tempête Dont l’œil et la bouche béante grondaient d’un bruit terrifiant. À force de courir, Maman vomissait du sang. |
जाने कब छोटी का मुझ से छूटा हाथ वहीं उसी दिन फेंक आया था अपना बचपन- लेकिन मैंने सरहद के सन्नाटों के सहराओं में अकसर देखा है एक ‘भमेरी’ अब भी नाचा करती है और एक ‘लाटू’ अब भी घूमा करता है! |
Qui sait quand la main de Tchhoti, petite sœur, lui a échappé… Ce jour-là, j’ai perdu mon enfance… Mais à la frontière, dans le silence du désert, j’ai souvent vu Danser un moulin à vent Et tournoyer une toupie en bois ! |
Moulin à vent | |
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hama saba bhāga rahe the rephyūjī the māṁ ne jitane zevara the, saba pahana liye the bāṁdha liye the choṭī mujhe se – chaha sāloṃ kī dūdha pilāke, khūba khilāke, sātha liyā thā maiṃne apanī eka ‘bhamerī’ aura ika ‘lāṭū’ pājāme meṃ uṛasa liyā thā rāta kī rāta hama gāṁva choṛakara bhāga rahe the rephyūjī the |
Nous fuyions tous, Nous, les réfugiés. Maman portait sur elle tous les bijoux qu’elle possédait. Elle tenait fermement Tchhoti, ma sœur de six ans ma cadette, Après lui avoir donné à manger et à boire du lait. Moi, j’avais caché un moulin à vent et une toupie Dans mon pyjama. À la faveur des ombres de la nuit, délaissant le village, nous fuyions, Nous, les réfugiés. |
āga dhueṁ aura cīkha pukāra ke jaṃgala se guzare the sāre hama saba-ke-saba ghora dhueṁ meṃ bhāga rahe the hātha kisī āṁdhī kī āṁteṃ phāṛa rahe the āṁkheṃ apane jabaṛe khole bhoṃka rahī thīṃ māṁ ne dauṛate-dauṛate khūna kī qai kara dī thī |
Nous nous frayions un chemin dans une jungle de feu, de fumée et de cris, Tous ensemble, en masse, nous fuyions à travers une fumée opaque. Des mains déchiraient les entrailles de la tempête Dont l’œil et la bouche béante grondaient d’un bruit terrifiant. À force de courir, Maman vomissait du sang. |
jāne kaba choṭī kā mujha se chūṭā hātha vahīṃ usī dina pheṃka āyā thā apanā bacapana- lekina maiṃne sarahada ke sannāṭoṃ ke saharāoṃ meṃ akasara dekhā hai eka ‘bhamerī’ aba bhī nācā karatī hai aura eka ‘lāṭū’ aba bhī ghūmā karatā hai! |
Qui sait quand la main de Tchhoti, petite sœur, lui a échappé… Ce jour-là, j’ai perdu mon enfance… Mais à la frontière, dans le silence du désert, j’ai souvent vu Danser un moulin à vent Et tournoyer une toupie en bois ! |
साफ़े को सर से परोती हुई गुज़री गोली | La balle se fraya un chemin à travers le turban. |
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साफ़े को सर से परोती हुई गुज़री गोली और दीवार पे यूँ ख़ून गिरा, जैसे कोई पान का कुल्ला कर दे! एक बौछार सी फिर आतिश-व-बारूद की बरसी सर, धड़, हाथ, गिरे चारों तरफ़ फटते हुए भट्टी में जैसे चटकते हुए कुछ मक्की के दाने सब-के-सब भूने गए एक पटाखों की लड़ी से! |
La balle se fraya un chemin à travers le turban Et le sang gicla sur le mur comme si quelqu’un avait craché du bétel sanguinolant ! Une nouvelle pluie de feu et de poudre se déversa : Têtes, torses, mains tombèrent, volant en éclat en tous sens Comme des grains de maïs projetés dans un four, Tous calcinés par une tresse de pétards. |
एक सन्नाटा सा कुछ देर खड़ा सुनता रहा कोई आवाज़ सिसकने की सुनाई दी थी। घर के इक कोने में चुप चाप खड़ा इक दीया काँप रहा था! |
Figé un instant, le silence écoutait ; Des sanglots résonnaient. Figée dans un coin de la maison, muette, Une lampe à huile tremblait ! |
sāfe ko sara se parotī huī guzarī golī | La balle se fraya un chemin à travers le turban. |
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sāfe ko sara se parotī huī guzarī golī aura dīvāra pe yūṁ khūna girā, jaise koī pāna kā kullā kara de! eka bauchāra sī phira ātiśa-va-bārūda kī barasī sara, dhaṛa, hātha, gire cāroṃ tarafa phaṭate hue bhaṭṭī meṃ jaise caṭakate hue kucha makkī ke dāne saba-ke-saba bhūne gae eka paṭākhoṃ kī laṛī se! |
La balle se fraya un chemin à travers le turban Et le sang gicla sur le mur comme si quelqu’un avait craché du bétel sanguinolant ! Une nouvelle pluie de feu et de poudre se déversa : Têtes, torses, mains tombèrent, volant en éclat en tous sens Comme des grains de maïs projetés dans un four, Tous calcinés par une tresse de pétards. |
eka sannāṭā sā kucha dera khaṛā sunatā rahā koī āvāza sisakane kī sunāī dī thī। ghara ke ika kone meṃ cupa cāpa khaṛā ika dīyā kāṁpa rahā thā! |
Figé un instant, le silence écoutait ; Des sanglots résonnaient. Figée dans un coin de la maison, muette, Une lampe à huile tremblait ! |
मंज़र | Une scène |
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बड़ी ठंडी हवा थी, और छब्बीस जनवरी थी! फ़िज़ा में कुहरा था, लाहौर था… दरिया-ए-रावी बह रहा था… कचहरी बन्द थी, और छत पे अंग्रेज़ों का झंडा था वो तीनों दम-बख़ुद दीवार से लगके खड़े थे सुबह की दूर से साँसें सुनाई दे रही थीं उन्हें उस रात छत पे चढ़के अंग्रेज़ों का वो पर्चम गिराना था वो तीनों सोचकर आए थे हिंदुस्तान की पोशाक बदलेंगे! ‘ज़फ़र’ बल्लम पे था, जब सर में यूँ जाकर फटी गोली कि पूरे मुल्क में छींटे पड़े उड़कर…! |
Le vent était glacial à Lahore en ce 26 janvier1 ! Une nappe de brume s’étirait dans le vent Et la Ravi, majestueuse, s’écoulait… Le tribunal était fermé, et sur la terrasse flottait l’Union Jack. Tous les trois étaient là, debout contre le mur, retenant leur souffle. Au loin, on entendait monter et descendre la respiration calme de l’aube. Cette nuit-là, ils devaient escalader la terrasse et faire tomber le drapeau britannique ; Tous les trois s’imaginaient le troquer contre la nouvelle parure de l’Inde ! Zafar était sur la hampe quand la balle percuta sa tête, Éclaboussant le pays tout entier des gouttes de son sang… |
बड़ी ठंडी हवा है, और छब्बीस जनवरी है फ़िज़ा में कुहरा है दिल्ली में ‘झांकी’ चल रही है लाहौर में दरिया-ए-रावी बह रहा है |
Le vent est glacial en ce 26 janvier… Une nappe de brume s’étire dans le vent. À Delhi, défilent les chars sur le boulevard2 ; À Lahore, s’écoule, immense, la Ravi. |
1 | Le 26 janvier est le Jour de la République, fête nationale en Inde. Elle célèbre l’entrée en vigueur de la Constitution de l’Inde avec la fin du Dominion. C’est l’une des trois fêtes nationales, les deux autres étant le Jour de l’Indépendance (célébré le 15 août) et Gandhi Jayanti (le 2 octobre). |
2 | Il porte le nom de Rajpath (« la voie du Roi »). Il s’étire du Rashtrapati Bhavan jusqu’à Raisina Hill via Vijay Chowk et la Porte de l’Inde. Considéré comme l’une des principales avenues de l’Inde, il voit défiler la parade annuelle lors du Jour de la République. |
maṃzara | Une scène |
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baṛī ṭhaṃḍī havā thī, aura chabbīsa janavarī thī! fizā meṃ kuharā thā, lāhaura thā… dariyā-e-rāvī baha rahā thā… kacaharī banda thī, aura chata pe aṃgrezoṃ kā jhaṃḍā thā vo tīnoṃ dama-bakhuda dīvāra se lagake khaṛe the subaha kī dūra se sāṁseṃ sunāī de rahī thīṃ unheṃ usa rāta chata pe caṛhake aṃgrezoṃ kā vo parcama girānā thā vo tīnoṃ socakara āe the hiṃdustāna kī pośāka badaleṃge! ‘zafara’ ballama pe thā, jaba sara meṃ yūṁ jākara phaṭī golī ki pūre mulka meṃ chīṃṭe paṛe uṛakara…! |
Le vent était glacial à Lahore en ce 26 janvier1 ! Une nappe de brume s’étirait dans le vent Et la Ravi, majestueuse, s’écoulait… Le tribunal était fermé, et sur la terrasse flottait l’Union Jack. Tous les trois étaient là, debout contre le mur, retenant leur souffle. Au loin, on entendait monter et descendre la respiration calme de l’aube. Cette nuit-là, ils devaient escalader la terrasse et faire tomber le drapeau britannique ; Tous les trois s’imaginaient le troquer contre la nouvelle parure de l’Inde ! Zafar était sur la hampe quand la balle percuta sa tête, Éclaboussant le pays tout entier des gouttes de son sang… |
baṛī ṭhaṃḍī havā hai, aura chabbīsa janavarī hai fizā meṃ kuharā hai dillī meṃ ‘jhāṃkī’ cala rahī hai lāhaura meṃ dariyā-e-rāvī baha rahā hai |
Le vent est glacial en ce 26 janvier… Une nappe de brume s’étire dans le vent. À Delhi, défilent les chars sur le boulevard2 ; À Lahore, s’écoule, immense, la Ravi. |
1 | Le 26 janvier est le Jour de la République, fête nationale en Inde. Elle célèbre l’entrée en vigueur de la Constitution de l’Inde avec la fin du Dominion. C’est l’une des trois fêtes nationales, les deux autres étant le Jour de l’Indépendance (célébré le 15 août) et Gandhi Jayanti (le 2 octobre). |
2 | Il porte le nom de Rajpath (« la voie du Roi »). Il s’étire du Rashtrapati Bhavan jusqu’à Raisina Hill via Vijay Chowk et la Porte de l’Inde. Considéré comme l’une des principales avenues de l’Inde, il voit défiler la parade annuelle lors du Jour de la République. |
कराची! | Karachi |
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तेरे शहर में भी तो चीलें उसी तरह लाशों के ऊपर मंडराती हैं जैसे मेरे शहर के चौराहों पर बन्द-ओ-बस्त की गोलियाँ खाकर… लोगों की लाशें जब गिरती हैं आसमान पर मंडराते गिद्ध नीचे उतर आते हैं |
Dans ta ville aussi, les vautours Planent au-dessus des cadavres ; Comme dans la mienne, aux carrefours, Tous ceux abattus par les « forces de l’Ordre »… Quand les cadavres de simples mortels tombent, Les charognards planant dans le ciel fondent sur eux. |
हम दोनों के दो मुल्कों में आम आदमी कितने मिलते जुलते हैं! |
Dans nos deux pays, Comme les gens honnêtes se ressemblent ! |
karācī! | Karachi |
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tere śahara meṃ bhī to cīleṃ usī taraha lāśoṃ ke ūpara maṃḍarātī haiṃ jaise mere śahara ke caurāhoṃ para banda-o-basta kī goliyāṁ khākara… logoṃ kī lāśeṃ jaba giratī haiṃ āsamāna para maṃḍarāte giddha nīce utara āte haiṃ |
Dans ta ville aussi, les vautours Planent au-dessus des cadavres ; Comme dans la mienne, aux carrefours, Tous ceux abattus par les « forces de l’Ordre »… Quand les cadavres de simples mortels tombent, Les charognards planant dans le ciel fondent sur eux. |
hama donoṃ ke do mulkoṃ meṃ āma ādamī kitane milate julate haiṃ! |
Dans nos deux pays, Comme les gens honnêtes se ressemblent ! |
टोबा टेक सिंह! | Toba Tek Singh1 |
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मुझे वाघा पे ‘टोबा टेक सिंह’ वाले ‘बिशन’ से जाके मिलना है सुना है वो अभी तक सूजे पैरों पर खड़ा है जिस जगह मंटो ने छोड़ा था वो अब तक बड़बड़ाता है ‘औपर दी गुड़-गुड़ मुंग दी दाल दी लालटेन’ |
Je dois aller à Wagah voir Monsieur Bishan de la nouvelle Toba Tek Singh. Il paraît qu’il est toujours debout, les pieds enflés, là où Manto, son auteur, l’a laissé. Et il marmonnerait toujours : « Oper di gur-gur, moong di daal di laltain. »2 |
पता लेना है उस पागल का ऊँची डाल पर चढ़कर जो कहता था ख़ुदा है वो उसी को फ़ैसला करना है किसका गाँव किस हिस्से में जाएगा वो कब उतरेगा अपनी डाल से उस को बताना है अभी कुछ और भी दल हैं कि जिन को बाँटने का, काटने का काम जारी है वो बटवारा तो पहला था अभी कुछ और बटवारे भी, बाक़ी हैं! |
Il faut que je retrouve ce fou célèbre Qui, grimpé sur une haute branche, Se proclamait Dieu ! C’est à lui de décider : ce village, de quel côté passera-t-il ? Et lui, quand descendra-t-il de son arbre ? Il faut que je lui dise Que des bataillons sont toujours à l’œuvre, Que la tâche de diviser et de découper n’a pas cessé. Cette Partition était la première, Mais bien d’autres partitions sont encore à venir ! |
मुझे वाघा पे टोबा टेक सिंह वाले बिशन से जाके मिलना है ख़बर देनी है उसके दोस्त ‘अफ़ज़ल’ की वो ‘लहन सिंह’, वाधवा सिंह, वो भैन अमृत’ जो सारे कतल होकर इस तरफ़ आए थे उनकी गर्दनें सामान ही में लुट गईं पीछे |
Je dois aller voir Bishan, Lui donner des nouvelles de son ami Afzal, De Lahana Singh, de Wadhwa Singh et d’Amrit Behen, De tous ceux qui, assassinés ou meurtris, Arrivèrent de ce côté-ci. Leurs têtes, leurs biens, tout fut pillé. |
ज़बह कर दे वो ‘भूरी’ अब कोई लेने न आएगा। वो लड़की एक उंगली जो बड़ी होती थी हर बारह महीनों में वो अब हर इक बरस इक पोटा-पोटा घटती रहती है बताना है कि सब पागल अभी पहुँचे नहीं अपने ठिकानों पर बहुत से इस तरफ़ हैं, और बहुत से उस तरफ़ भी हैं मुझे वाघा पे टोबा टेक सिंह वाले बिशन अकसर यही कहके बुलाता है ‘उपर/औपर दी गुड़-गुड़ मुंग दी दाल दी लालटेन… दी हिन्दुस्तान ते पाकिस्तान दी दुर फटे मुँह!’ |
Il est temps de sacrifier Bhouri, personne ne viendra la chercher désormais. Cette fille qui grandissait d’un doigt tous les douze mois, La voilà qui peu à peu rétrécit, à bout de forces, d’année en année. Il faut que je lui dise que tous les fous n’ont pas encore atteint leur destination. Beaucoup errent de ce côté-ci, et beaucoup, de l’autre côté aussi… Souvent Monsieur Bishan m’appelle à Wagah en disant : « Oper di gur-gur, moong di daal di laltain… di Hindustan te Pakistan di dur phate munh. »3 |
1 | Toba Tek Siṅgh est une célèbre nouvelle de Sa‛ādat Ḥasan Manṭo, nouvelliste ourdou le plus novateur des années 1930-1950 (voir Toba Tek Siṅgh sur ce site). Elle fut traduite en français par Denis Matringe et publiée and la revue Siècle 21 en 2002. Œuvre parmi les plus frappantes consacrées à la partition de l’Inde et du Pakistan, elle traite de l’échange d’aliénés entre les deux pays dans un style mêlant tragique et grotesque, tournant en dérision l’événement historique à partir à partir de cas saisissants situés dans un asile de Lahore. |
2 | Charabia, quelque chose comme « soja of la tôle del idiot del annexe del susucre là-hyaut. » |
3 | Quelque chose comme : « Soja of l’Inde et le Pakistan of el zuberbe gueule del idiot del annexe del susucre là-hyaut. » |
ṭobā ṭeka siṃha! | Toba Tek Singh1 |
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mujhe vāghā pe ‘ṭobā ṭeka siṃha’ vāle ‘biśana’ se jāke milanā hai sunā hai vo abhī taka sūje pairoṃ para khaṛā hai jisa jagaha maṃṭo ne choṛā thā vo aba taka baṛabaṛātā hai ‘aupara dī guṛa-guṛa muṃga dī dāla dī lālaṭena’ |
Je dois aller à Wagah voir Monsieur Bishan de la nouvelle Toba Tek Singh. Il paraît qu’il est toujours debout, les pieds enflés, là où Manto, son auteur, l’a laissé. Et il marmonnerait toujours : « Oper di gur-gur, moong di daal di laltain. »2 |
patā lenā hai usa pāgala kā ūṁcī ḍāla para caṛhakara jo kahatā thā khudā hai vo usī ko faisalā karanā hai kisakā gāṁva kisa hisse meṃ jāegā vo kaba utaregā apanī ḍāla se usa ko batānā hai abhī kucha aura bhī dala haiṃ ki jina ko bāṁṭane kā, kāṭane kā kāma jārī hai vo baṭavārā to pahalā thā abhī kucha aura baṭavāre bhī, bāqī haiṃ! |
Il faut que je retrouve ce fou célèbre Qui, grimpé sur une haute branche, Se proclamait Dieu ! C’est à lui de décider : ce village, de quel côté passera-t-il ? Et lui, quand descendra-t-il de son arbre ? Il faut que je lui dise Que des bataillons sont toujours à l’œuvre, Que la tâche de diviser et de découper n’a pas cessé. Cette Partition était la première, Mais bien d’autres partitions sont encore à venir ! |
mujhe vāghā pe ṭobā ṭeka siṃha vāle biśana se jāke milanā hai khabara denī hai usake dosta ‘afazala’ kī vo ‘lahana siṃha’, vādhavā siṃha, vo bhaina amṛta’ jo sāre katala hokara isa tarafa āe the unakī gardaneṃ sāmāna hī meṃ luṭa gaīṃ pīche |
Je dois aller voir Bishan, Lui donner des nouvelles de son ami Afzal, De Lahana Singh, de Wadhwa Singh et d’Amrit Behen, De tous ceux qui, assassinés ou meurtris, Arrivèrent de ce côté-ci. Leurs têtes, leurs biens, tout fut pillé. |
zabaha kara de vo ‘bhūrī’ aba koī lene na āegā। vo laṛakī eka uṃgalī jo baṛī hotī thī hara bāraha mahīnoṃ meṃ vo aba hara ika barasa ika poṭā-poṭā ghaṭatī rahatī hai batānā hai ki saba pāgala abhī pahuṁce nahīṃ apane ṭhikānoṃ para bahuta se isa tarafa haiṃ, aura bahuta se usa tarafa bhī haiṃ mujhe vāghā pe ṭobā ṭeka siṃha vāle biśana akasara yahī kahake bulātā hai ‘upara/aupara dī guṛa-guṛa muṃga dī dāla dī lālaṭena… dī hindustāna te pākistāna dī dura phaṭe muṁha!’ |
Il est temps de sacrifier Bhouri, personne ne viendra la chercher désormais. Cette fille qui grandissait d’un doigt tous les douze mois, La voilà qui peu à peu rétrécit, à bout de forces, d’année en année. Il faut que je lui dise que tous les fous n’ont pas encore atteint leur destination. Beaucoup errent de ce côté-ci, et beaucoup, de l’autre côté aussi… Souvent Monsieur Bishan m’appelle à Wagah en disant : « Oper di gur-gur, moong di daal di laltain… di Hindustan te Pakistan di dur phate munh. »3 |
1 | Toba Tek Siṅgh est une célèbre nouvelle de Sa‛ādat Ḥasan Manṭo, nouvelliste ourdou le plus novateur des années 1930-1950 (voir Toba Tek Siṅgh sur ce site). Elle fut traduite en français par Denis Matringe et publiée and la revue Siècle 21 en 2002. Œuvre parmi les plus frappantes consacrées à la partition de l’Inde et du Pakistan, elle traite de l’échange d’aliénés entre les deux pays dans un style mêlant tragique et grotesque, tournant en dérision l’événement historique à partir à partir de cas saisissants situés dans un asile de Lahore. |
2 | Charabia, quelque chose comme « soja of la tôle del idiot del annexe del susucre là-hyaut. » |
3 | Quelque chose comme : « Soja of l’Inde et le Pakistan of el zuberbe gueule del idiot del annexe del susucre là-hyaut. » |
सरहद पर ये सकता क्यों है? | Pourquoi ce calme à la frontière ? |
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सरहद पर ये सकता क्यों है? इस बर्फ़ाब सी ख़ामोशी से डर लगता है! |
Pourquoi ce calme à la frontière ? Que ce silence glacial m’effraie ! |
बगुले जैसी ख़ामोशी मक्कार बहुत है एक टाँग पर खड़े-खड़े भी एक आँख से ध्यान लगाए दूजी आँख खुली रखती है। |
Ce mutisme de héron suinte de fourberie1. Debout sur une seule patte, Un œil fermé, en méditation, Il garde l’autre œil ouvert. |
जब भी कोई हलचल हो तो सरहद की दोनों जानिब ही काँटेदार आवाज़ों के कुछ केकटस उगने लगते हैं! |
Au moindre mouvement, Des deux côtés de la frontière du Sud Claquent des voix comme des cactus hérissés d’épines ! |
सरहद के रेगिस्तानों में साँस दबाकर चलती है ख़ामोश हवा रेत, ज़मीं से गर्दन घिसकर उड़ती है सरहद पर सकता तारी है सरहद की इस बर्फ़ाब सी ख़ामोशी से अब डर लगता है! |
Dans les déserts, le long de la frontière, Retenant son souffle, court le vent silencieux. Le sable rase le sol et volette, Le calme absolu s’est installé à la frontière… À la frontière maintenant, je crains ce silence glacial ! |
1 | Allusion au conte du Pañcatantra : Le héron et le crabe (sur ce site). |
sarahada para ye sakatā kyoṃ hai? | Pourquoi ce calme à la frontière ? |
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sarahada para ye sakatā kyoṃ hai? isa barfāba sī khāmośī se ḍara lagatā hai! |
Pourquoi ce calme à la frontière ? Que ce silence glacial m’effraie ! |
bagule jaisī khāmośī makkāra bahuta hai eka ṭāṁga para khaṛe-khaṛe bhī eka āṁkha se dhyāna lagāe dūjī āṁkha khulī rakhatī hai। |
Ce mutisme de héron suinte de fourberie1. Debout sur une seule patte, Un œil fermé, en méditation, Il garde l’autre œil ouvert. |
jaba bhī koī halacala ho to sarahada kī donoṃ jāniba hī kāṁṭedāra āvāzoṃ ke kucha kekatsa ugane lagate haiṃ! |
Au moindre mouvement, Des deux côtés de la frontière du Sud Claquent des voix comme des cactus hérissés d’épines ! |
sarahada ke registānoṃ meṃ sāṁsa dabākara calatī hai khāmośa havā reta, zamīṃ se gardana ghisakara uṛatī hai sarahada para sakatā tārī hai sarahada kī isa barfāba sī khāmośī se aba ḍara lagatā hai! |
Dans les déserts, le long de la frontière, Retenant son souffle, court le vent silencieux. Le sable rase le sol et volette, Le calme absolu s’est installé à la frontière… À la frontière maintenant, je crains ce silence glacial ! |
1 | Allusion au conte du Pañcatantra : Le héron et le crabe (sur ce site). |
पड़ोसी | Voisins |
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जब तक मेरे सामने वाले घर में रौशनी जलती है मेरे कमरे की दीवार पे उस घर की परछाइयाँ चलती रहती हैं |
Tant que luit la lumière dans la maison d’en face, Les ombres de cette maison glissent Sur le mur de ma chambre. |
इक ‘वील चैर’ है धक्का खाके दाएँ बाएँ घूमती रहती है उस घर की दो पालतू चिड़ियाँ उड़ती हैं तो मेरी इस दीवार से टकरा जाती हैं उस घर में लटका इक पिंजरा, मेरे घर का पिंजरा लगता है |
Il y a un fauteuil roulant. Il se cogne sans cesse, tourne à droite, puis à gauche. Quand les deux oiseaux de cette maison volent, Ils viennent alors se heurter contre mon mur. La cage suspendue dans cette maison-là devient ma propre cage. |
जाने कौन सी खिड़की बन्द होती है, जिसकी जाली से दीवार पे जेल का दरवाज़ा बन जाता है आते जाते लोग सभी क़ैदी लगते हैं |
Qui sait quelle fenêtre à barreaux se referme… Sur mon mur se dessine une porte de prison Tous les passants ressemblent à des prisonniers. |
नंगा लटका बल्ब कभी हिल जाए तो लोग हवा में उड़ने लगते हैं इक सर्कस लग जाती है कुछ देर ग़दर मच जाता है |
Parfois quand l’ampoule nue, suspendue, se balance, Les gens commencent à voltiger dans l’air, Tels des trapézistes de cirque ! Pendant quelques instants, le chaos règne. |
फिर वो खिड़की खुल जाती है और कोई बत्ती जलती है दो झूमते साऐ लिपटे-लिपटे, बालकनी में, आके खड़े हो जाते हैं शायद मेरे घर की जानिब देख रहे हैं |
Puis la fenêtre s’ouvre, Une lumière s’allume. Deux silhouettes enlacées se balancent, viennent se poster sur le balcon. Peut-être leur regard fixe-t-il ma maison… |
कभी-कभी यूँ भी होता है उस घर के धुएँ की परछाईं, मेरी दीवार पे पड़ती है तब लगता है… दोनों घरों में आग लगी है! |
Il arrive aussi parfois que L’ombre de la fumée de cette maison se projette sur mon mur Alors on dirait bien… Les deux maisons sont en feu ! |
paṛosī | Voisins |
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jaba taka mere sāmane vāle ghara meṃ rauśanī jalatī hai mere kamare kī dīvāra pe usa ghara kī parachāiyāṁ calatī rahatī haiṃ |
Tant que luit la lumière dans la maison d’en face, Les ombres de cette maison glissent Sur le mur de ma chambre. |
ika ‘vīla caira’ hai dhakkā khāke dāeṁ bāeṁ ghūmatī rahatī hai usa ghara kī do pālatū ciṛiyāṁ uṛatī haiṃ to merī isa dīvāra se ṭakarā jātī haiṃ usa ghara meṃ laṭakā ika piṃjarā, mere ghara kā piṃjarā lagatā hai |
Il y a un fauteuil roulant. Il se cogne sans cesse, tourne à droite, puis à gauche. Quand les deux oiseaux de cette maison volent, Ils viennent alors se heurter contre mon mur. La cage suspendue dans cette maison-là devient ma propre cage. |
jāne kauna sī khiṛakī banda hotī hai, jisakī jālī se dīvāra pe jela kā daravāzā bana jātā hai āte jāte loga sabhī qaidī lagate haiṃ |
Qui sait quelle fenêtre à barreaux se referme… Sur mon mur se dessine une porte de prison Tous les passants ressemblent à des prisonniers. |
naṃgā laṭakā balba kabhī hila jāe to loga havā meṃ uṛane lagate haiṃ ika sarkasa laga jātī hai kucha dera gadara maca jātā hai |
Parfois quand l’ampoule nue, suspendue, se balance, Les gens commencent à voltiger dans l’air, Tels des trapézistes de cirque ! Pendant quelques instants, le chaos règne. |
phira vo khiṛakī khula jātī hai aura koī battī jalatī hai do jhūmate sāai lipaṭe-lipaṭe, bālakanī meṃ, āke khaṛe ho jāte haiṃ śāyada mere ghara kī jāniba dekha rahe haiṃ |
Puis la fenêtre s’ouvre, Une lumière s’allume. Deux silhouettes enlacées se balancent, viennent se poster sur le balcon. Peut-être leur regard fixe-t-il ma maison… |
kabhī-kabhī yūṁ bhī hotā hai usa ghara ke dhueṁ kī parachāīṃ, merī dīvāra pe paṛatī hai taba lagatā hai… donoṃ gharoṃ meṃ āga lagī hai! |
Il arrive aussi parfois que L’ombre de la fumée de cette maison se projette sur mon mur Alors on dirait bien… Les deux maisons sont en feu ! |
हम वतन | Compatriote |
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बहुत दिनों में सही, रंग धूप का बदला बहुत दिनों में सही, फिर से मुस्कराए तुम |
Enfin, après tant de jours, les couleurs du soleil ont changé ; Enfin, après tant de jours, tu as de nouveau souri. |
पचास साल से मैं हिचकियाँ दबाए हुए इस इंतज़ार में था, आँख उठाके देखो तुम तो ख़ुश्क अश्कों की तहरीर पढ़ सको शायद कि मेरा दर्द जुदाई का तुम से कम तो न था |
Refoulant mes sanglots depuis cinquante années, J’attendais ce jour : regarde-moi, les yeux levés, Et peut-être pourras-tu lire ce que les larmes desséchées ont écrit. Toi comme moi fûmes mortifiés de cette séparation. |
हर एक रोज़ तुम्हारी ज़मीं को सजदा किया हर एक रात तुम्हारे फ़लक को चूमा है कि मेरे चाँद सितारे तो आज भी हैं वही जो छत पे लेटे हुए रोज़ देखते हो तुम कि चाँद आज भी पढ़ता हूँ मैं उसी रुख़ से वो जिस पे तुमने कई बार दस्तख़त करके फ़लक पे छोड़ दिया, रात-रात उड़ता रहे |
Chaque jour, j’ai rendu hommage à ta patrie, Chaque nuit, j’ai embrassé ton ciel. La lune et les étoiles que je vois sont les mêmes encore aujourd’hui Que celles que tu vois, toi, allongé sur ta terrasse chaque nuit. Encore aujourd’hui, je déchiffre la lune de la même manière, Cette lune sur laquelle, à maintes reprises, tu as apposé ta signature Et que tu as mise à flot dans le ciel, nuit après nuit pour qu’elle voltige. |
हवा गई जो कभी झूलकर तुम्हारी तरफ़ हज़ार गजरे कलाई पे बाँधकर भेजा गए जो अभ्र कभी उस तरफ़, कहा उन से वो लहजा नर्म रखें और अदब से बरसा करें |
Quand parfois la brise se dirige vers toi en tanguant, Je lui attache mille guirlandes parfumées au poignet avant de te l’envoyer. Quand parfois les nuages voyagent vers toi, je leur demande De ralentir et de pleuvoir avec respect. |
तुम्हें अज़ीज़ है अपना वतन, मैं जानता हूँ मुझे भी उस से मुहब्बत है, तुम यक़ीं कर लो ज़रा सा फ़र्क़ है गर तुम समझ सको इसको कि तुम वहीं के हो और मैं वहीं से हूँ! |
Ta patrie t’est chère, je sais. Je l’aime moi aussi, crois-moi. Mais à une différence près, si seulement tu pouvais la comprendre… Toi, tu es là-bas, et moi, je viens de là-bas ! |
hama vatana | Compatriote |
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bahuta dinoṃ meṃ sahī, raṃga dhūpa kā badalā bahuta dinoṃ meṃ sahī, phira se muskarāe tuma |
Enfin, après tant de jours, les couleurs du soleil ont changé ; Enfin, après tant de jours, tu as de nouveau souri. |
pacāsa sāla se maiṃ hicakiyāṁ dabāe hue isa iṃtazāra meṃ thā, āṁkha uṭhāke dekho tuma to khuśka aśkoṃ kī taharīra paṛha sako śāyada ki merā darda judāī kā tuma se kama to na thā |
Refoulant mes sanglots depuis cinquante années, J’attendais ce jour : regarde-moi, les yeux levés, Et peut-être pourras-tu lire ce que les larmes desséchées ont écrit. Toi comme moi fûmes mortifiés de cette séparation. |
hara eka roza tumhārī zamīṃ ko sajadā kiyā hara eka rāta tumhāre falaka ko cūmā hai ki mere cāṁda sitāre to āja bhī haiṃ vahī jo chata pe leṭe hue roza dekhate ho tuma ki cāṁda āja bhī paṛhatā hūṁ maiṃ usī rukha se vo jisa pe tumane kaī bāra dastakhata karake falaka pe choṛa diyā, rāta-rāta uṛatā rahe |
Chaque jour, j’ai rendu hommage à ta patrie, Chaque nuit, j’ai embrassé ton ciel. La lune et les étoiles que je vois sont les mêmes encore aujourd’hui Que celles que tu vois, toi, allongé sur ta terrasse chaque nuit. Encore aujourd’hui, je déchiffre la lune de la même manière, Cette lune sur laquelle, à maintes reprises, tu as apposé ta signature Et que tu as mise à flot dans le ciel, nuit après nuit pour qu’elle voltige. |
havā gaī jo kabhī jhūlakara tumhārī tarafa hazāra gajare kalāī pe bāṁdhakara bhejā gae jo abhra kabhī usa tarafa, kahā una se vo lahajā narma rakheṃ aura adaba se barasā kareṃ |
Quand parfois la brise se dirige vers toi en tanguant, Je lui attache mille guirlandes parfumées au poignet avant de te l’envoyer. Quand parfois les nuages voyagent vers toi, je leur demande De ralentir et de pleuvoir avec respect. |
tumheṃ azīza hai apanā vatana, maiṃ jānatā hūṁ mujhe bhī usa se muhabbata hai, tuma yaqīṃ kara lo zarā sā farqa hai gara tuma samajha sako isako ki tuma vahīṃ ke ho aura maiṃ vahīṃ se hūṁ! |
Ta patrie t’est chère, je sais. Je l’aime moi aussi, crois-moi. Mais à une différence près, si seulement tu pouvais la comprendre… Toi, tu es là-bas, et moi, je viens de là-bas ! |
ज़िंदा नामा | Au nom de la vie |
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चाँद लाहौर की गलियों से गुज़रके इक शब जेल की ऊँची फ़सीलें चढ़के यूँ ‘कमांडो’ की तरह कूद गया था ‘सेल’ में, कोई आहट न हुई पहरेदारों को पता ही न चला |
Une nuit, la lune traverse les ruelles de Lahore, Grimpe le long des hauts remparts de la prison, Et, comme un commando, bondit dans la cellule sans bruit. Les geôliers n’ont rien vu. |
फ़ैज़ से मिलने गया था, ये सुना है फ़ैज़ से कहने, कोई नज़्म कहो, वक़्त की नब्ज़ रुकी है कुछ कहो वक़्त की नब्ज़ चले! |
On dit qu’elle a rendu visite au poète Faiz1 Pour lui réclamer un poème. Le pouls du temps s’est arrêté… Dis quelque chose, Fais palpiter le pouls du temps ! |
1 | फ़ैज़ अहमद फ़ैज़ (en ourdou : فیض احمد فیض) est un des plus grands poètes d’expression ourdoue (1911-1984). Emprisonné de 1951 à 1955, il fut privé au début de sa détention de papier et d’encre. Une sélection de ses poèmes peut être consultée sur Chatranjali. |
ziṃdā nāmā | Au nom de la vie |
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cāṁda lāhaura kī galiyoṃ se guzarake ika śaba jela kī ūṁcī fasīleṃ caṛhake yūṁ ‘kamāṃḍo’ kī taraha kūda gayā thā ‘sela’ meṃ, koī āhaṭa na huī paharedāroṃ ko patā hī na calā |
Une nuit, la lune traverse les ruelles de Lahore, Grimpe le long des hauts remparts de la prison, Et, comme un commando, bondit dans la cellule sans bruit. Les geôliers n’ont rien vu. |
faiza se milane gayā thā, ye sunā hai faiza se kahane, koī nazma kaho, vaqta kī nabza rukī hai kucha kaho vaqta kī nabza cale! |
On dit qu’elle a rendu visite au poète Faiz1 Pour lui réclamer un poème. Le pouls du temps s’est arrêté… Dis quelque chose, Fais palpiter le pouls du temps ! |
1 | फ़ैज़ अहमद फ़ैज़ (en ourdou : فیض احمد فیض) est un des plus grands poètes d’expression ourdoue (1911-1984). Emprisonné de 1951 à 1955, il fut privé au début de sa détention de papier et d’encre. Une sélection de ses poèmes peut être consultée sur Chatranjali. |
आँखों को वीज़ा नहीं लगता | Les yeux n’ont pas besoin de visa. |
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आँखों को वीज़ा नहीं लगता सपनों की सरहद होती नहीं बन्द आँखों से रोज़ मैं सरहद पार चला जाता हूँ मिलने, ‘मेहंदी हसन’ से! |
Les yeux n’ont pas besoin de visa, Les rêves n’ont pas de frontières… Les yeux fermés, je franchis la frontière chaque jour Pour écouter le célèbre chanteur Mehdi Hassan1 ! |
सुनता हूँ उनकी आवाज़ को चोट लगी है और ग़ज़ल ख़ामोश है सामने बैठी हुई है काँप रहे हैं होंठ ग़ज़ल के! जब कहते हैं… सूख गए हैं फूल किताबों में यार ‘फ़राज़’ भी बिछड़ गए, अब शायद मिले वो ख़्वाबों में! बन्द आँखों से अकसर सरहद पार चला जाता हूँ मैं! |
J’entends dire que sa voix est brisée Et que le ghazal2, assis devant lui, est muet. Ses lèvres tremblent Quand il dit… « Les fleurs ont séché dans les pages des livres, L’ami Faraz3 aussi s’en est allé, Peut-être désormais le retrouverai-je dans les rêves ! » Les yeux fermés, souvent je franchis la frontière. |
आँखों को वीज़ा नहीं लगता सपनों की सरहद, कोई नहीं! |
Les yeux n’ont pas besoin de visa, Les rêves n’ont aucune frontière. |
1 | Mehdi Hassan, (en ourdou : مہدی حسن), surnommé Khan Sahib ou Shahenshah-e-Ghazal (« roi du ghazal »), est un chanteur pakistanais de ghazal et de musique film à Lollywood (Lahore). Voir Mehdi Hassan sur Wikipédia (en anglais). | ||
2 | D’origine arabe, le ghazal (غزل) est, en littérature persane, le mode d’expression de la poésie lyrique, soit de l’amour, profane et mystique. Il compte cinq à douze distiques (groupes de deux vers) qui s’achèvent sur une même rime, les deux vers du premier rimant ensemble. Le dernier distique contient le pseudonyme du poète. Hāfiz et Sa’dī sont les maîtres incontestés du ghazal à sa période dite classique (xiiie-xve siècle). | ||
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Ahmed Faraz, voir Wikipedia (en aglais), nom de plume de Syed Ahmad Shah (en ourdou : سید احمد شاہ) 1931-2008, est un poète pakistanais d’expression ourdoue. Il a fondé l’Académie des lettres du Pakistan, dont il devint président. Il critiqua le régime militaire et le coup d’État dans le pays et fut chassé par les dictateurs militaires. Son poème ci-dessous fait écho à celui de Gulzar :
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āṁkhoṃ ko vīzā nahīṃ lagatā | Les yeux n’ont pas besoin de visa. |
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āṁkhoṃ ko vīzā nahīṃ lagatā sapanoṃ kī sarahada hotī nahīṃ banda āṁkhoṃ se roza maiṃ sarahada pāra calā jātā hūṁ milane, ‘mehaṃdī hasana’ se! |
Les yeux n’ont pas besoin de visa, Les rêves n’ont pas de frontières… Les yeux fermés, je franchis la frontière chaque jour Pour écouter le célèbre chanteur Mehdi Hassan1 ! |
sunatā hūṁ unakī āvāza ko coṭa lagī hai aura gazala khāmośa hai sāmane baiṭhī huī hai kāṁpa rahe haiṃ hoṃṭha gazala ke! jaba kahate haiṃ… sūkha gae haiṃ phūla kitāboṃ meṃ yāra ‘farāza’ bhī bichaṛa gae, aba śāyada mile vo khvāboṃ meṃ! banda āṁkhoṃ se akasara sarahada pāra calā jātā hūṁ maiṃ! |
J’entends dire que sa voix est brisée Et que le ghazal2, assis devant lui, est muet. Ses lèvres tremblent Quand il dit… « Les fleurs ont séché dans les pages des livres, L’ami Faraz3 aussi s’en est allé, Peut-être désormais le retrouverai-je dans les rêves ! » Les yeux fermés, souvent je franchis la frontière. |
āṁkhoṃ ko vīzā nahīṃ lagatā sapanoṃ kī sarahada, koī nahīṃ! |
Les yeux n’ont pas besoin de visa, Les rêves n’ont aucune frontière. |
1 | Mehdi Hassan, (en ourdou : مہدی حسن), surnommé Khan Sahib ou Shahenshah-e-Ghazal (« roi du ghazal »), est un chanteur pakistanais de ghazal et de musique film à Lollywood (Lahore). Voir Mehdi Hassan sur Wikipédia (en anglais). | ||
2 | D’origine arabe, le ghazal (غزل) est, en littérature persane, le mode d’expression de la poésie lyrique, soit de l’amour, profane et mystique. Il compte cinq à douze distiques (groupes de deux vers) qui s’achèvent sur une même rime, les deux vers du premier rimant ensemble. Le dernier distique contient le pseudonyme du poète. Hāfiz et Sa’dī sont les maîtres incontestés du ghazal à sa période dite classique (xiiie-xve siècle). | ||
3 |
Ahmed Faraz, voir Wikipedia (en aglais), nom de plume de Syed Ahmad Shah (en ourdou : سید احمد شاہ) 1931-2008, est un poète pakistanais d’expression ourdoue. Il a fondé l’Académie des lettres du Pakistan, dont il devint président. Il critiqua le régime militaire et le coup d’État dans le pays et fut chassé par les dictateurs militaires. Son poème ci-dessous fait écho à celui de Gulzar :
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सुनो, इस बार भी रमज़ान के दिन थे! | Écoute, cette fois aussi, c’était pendant le ramadan ! |
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सुनो, इस बार भी रमज़ान के दिन थे, मैं पाकिस्तान आया था… मेरे ‘वीज़ा’ में ‘इफ़्तारी’ तलक रुकने की गुंजाइश न थी मैं बॉम्बे लौट आया। |
Écoute, cette fois-là aussi, c’était pendant le ramadan ! Je m’étais rendu au Pakistan… Mon visa ne me permettait pas d’attendre jusqu’à la fin du jeûne Alors je suis rentré à Bombay. |
कराची के समुंदर पे मैं इक काग़ज़ की कश्ती रखके आया हूँ हवा का रुख़ कभी बदला तो शायद बहके आ जाए वगर्ना चाँद निकला ईद का जिस दिन, उसी को फूँक से तुम मेरी जानिब ठेल देना मैं साहिल पर खड़ा हूँ मैं साहिल पर मिलूंगा! |
Sur la mer près de Karachi, j’ai laissé derrière moi un bateau en papier. Si un jour les vents venaient à tourner, alors peut-être pourrait-il flotter jusqu’ici Ou sinon, le jour où la lune de l’Aïd paraîtra, Souffle-dessus et pousse-le vers moi ! Debout sur le rivage, J’attendrai ! |
suno, isa bāra bhī ramazāna ke dina the! | Écoute, cette fois aussi, c’était pendant le ramadan ! |
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suno, isa bāra bhī ramazāna ke dina the, maiṃ pākistāna āyā thā… mere ‘vīzā’ meṃ ‘iftārī’ talaka rukane kī guṃjāiśa na thī maiṃ bombe lauṭa āyā। |
Écoute, cette fois-là aussi, c’était pendant le ramadan ! Je m’étais rendu au Pakistan… Mon visa ne me permettait pas d’attendre jusqu’à la fin du jeûne Alors je suis rentré à Bombay. |
karācī ke samuṃdara pe maiṃ ika kāgaza kī kaśtī rakhake āyā hūṁ havā kā rukha kabhī badalā to śāyada bahake ā jāe vagarnā cāṁda nikalā īda kā jisa dina, usī ko phūṁka se tuma merī jāniba ṭhela denā maiṃ sāhila para khaṛā hūṁ maiṃ sāhila para milūṃgā! |
Sur la mer près de Karachi, j’ai laissé derrière moi un bateau en papier. Si un jour les vents venaient à tourner, alors peut-être pourrait-il flotter jusqu’ici Ou sinon, le jour où la lune de l’Aïd paraîtra, Souffle-dessus et pousse-le vers moi ! Debout sur le rivage, J’attendrai ! |
दिखाई देते हैं | Au loin… (ghazal) |
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दिखाई देते हैं, दूर तक अब भी साए कोई मगर बुलाने से वक़्त लौटे न आए कोई |
Au loin, quelques ombres sont encore visibles Mais malgré les appels, le temps ne revient pas, personne ne revient… |
वो ज़र्द पत्ते जो पेड़ से टूटकर गिरे थे कहाँ गए बहते पानियों में, बुलाए कोई |
Où sont donc passées ces feuilles jaunes qui, une à une, tombaient de l’arbre ? Dans les tourbillons de l’eau ? Qu’on les fasse revenir ! |
चलो न फिर से बिछाएँ दरियाँ, बजाएँ ढोलक लगाके मेहंदी, सुरीले टप्पे सुनाए कोई |
Allons, déroulons les tapis, battons tambour à nouveau ! Teints de henné, qu’on entonne un air mélodieux ! |
पतंग उड़ाएँ, छतों पे चढ़के, मोहल्ले वाले फ़लक तो साझा है, उस में पेचे लड़ाए कोई |
Grimpons sur les toits, lançons les cerfs-volants, ô voisins du quartier ! Sous le ciel partagé, rivalisons et éprouvons nos forces ! |
उठो कबड्डी-कबड्डी खेलेंगे, सरहदों पर जो आए अब के, तो लौटकर फिर न जाए कोई |
Lève-toi et, ensemble, jouons à kabaddi-kabaddi1 à cheval sur la frontière Et que celui qui traverse la ligne puisse choisir son camp ! |
1 | Le kabaddi (en hindi : कबड्डी ; en ourdou : کبڈی) est un sport de contact populaire, facile à apprendre, qui puise ses racines dans l’histoire millénaire de l’Inde ancienne et de l’Asie du Sud. Ses règles sont explicitées, par exemple sur Wikipédia. |
dikhāī dete haiṃ | Au loin… (ghazal) |
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dikhāī dete haiṃ, dūra taka aba bhī sāe koī magara bulāne se vaqta lauṭe na āe koī |
Au loin, quelques ombres sont encore visibles Mais malgré les appels, le temps ne revient pas, personne ne revient… |
vo zarda patte jo peṛa se ṭūṭakara gire the kahāṁ gae bahate pāniyoṃ meṃ, bulāe koī |
Où sont donc passées ces feuilles jaunes qui, une à une, tombaient de l’arbre ? Dans les tourbillons de l’eau ? Qu’on les fasse revenir ! |
calo na phira se bichāeṁ dariyāṁ, bajāeṁ ḍholaka lagāke mehaṃdī, surīle ṭappe sunāe koī |
Allons, déroulons les tapis, battons tambour à nouveau ! Teints de henné, qu’on entonne un air mélodieux ! |
pataṃga uṛāeṁ, chatoṃ pe caṛhake, mohalle vāle falaka to sājhā hai, usa meṃ pece laṛāe koī |
Grimpons sur les toits, lançons les cerfs-volants, ô voisins du quartier ! Sous le ciel partagé, rivalisons et éprouvons nos forces ! |
uṭho kabaḍḍī-kabaḍḍī kheleṃge, sarahadoṃ para jo āe aba ke, to lauṭakara phira na jāe koī |
Lève-toi et, ensemble, jouons à kabaddi-kabaddi1 à cheval sur la frontière Et que celui qui traverse la ligne puisse choisir son camp ! |
1 | Le kabaddi (en hindi : कबड्डी ; en ourdou : کبڈی) est un sport de contact populaire, facile à apprendre, qui puise ses racines dans l’histoire millénaire de l’Inde ancienne et de l’Asie du Sud. Ses règles sont explicitées, par exemple sur Wikipédia. |