Nissim Ezekiel
Night of the Scorpion

Ce poème est analysé (en anglais) sur  .

Night of the Scorpion La nuit du scorpion
Nissim Ezekiel Traduction : Jyoti Garin
I remember the night my mother
was stung by a scorpion. Ten hours
of steady rain had driven him
to crawl beneath a sack of rice.
Parting with his poison flash
of diabolic tail in the dark room…
he risked the ram again.
The peasants came like swarms of flies
and buzzed the name of God a hundred times
to paralyse the Evil One.
With candles and with lanterns
throwing giant scorpion shadows
on the sun-baked walls
they searched for him: he was not found.
They clicked their tongues.
With every movement that the scorpion made
his poison moved in Mother’s blood.
May he sit still; they said.
May the sins of your previous birth
be burned away tonight, they said.
May your suffering decrease
the misfortunes of your next birth, they said.
May the sum of evil
balanced in this unreal world
against the sum of good
become diminished by your pain.
May the poison purify your flesh
of desire, and your spirit of ambition,
they said, and they sat around
on the floor with my mother in the centre,
the peace of understanding on each face.
More candies, more lanterns, more neighbours,
more insects, and the endless rain.
My mother twisted through and through
groaning on a mat.
My father, sceptic, rationalist,
trying every curse and blessing,
powder, mixture, herb hybrid.
He even poured a little paraffin
upon the bitten toe and put a match to it.
I watched the flame feeding on my mother.
I watched the holy man perform his rites
to tame the poison with an incantation.
After twenty hours
it lost its sting.
My mother only said
Thank God the scorpion picked on me
and spared my children.
Je me souviens de la nuit où ma mère
fut piquée par un scorpion. Dix heures
de pluie continue l’avait conduit
à ramper jusque sous un sac de riz.
Se débarrassant par une giclée du poison
de sa queue diabolique dans la pièce obscure…
il manqua de redonner un coup de boutoir.
Les paysans arrivèrent comme des essaims de mouches
et bourdonnèrent cent fois le nom de Dieu
afin de paralyser le Maléfique.
Avec des bougies et des lanternes
Projetant des ombres géantes de scorpion
sur les murs cuits par le soleil,
ils le cherchèrent : introuvable !
Ils claquèrent leurs langues.
À chaque mouvement du scorpion
son poison s’infiltrait dans le sang de Mère.
Ils dirent : qu’il cesse de bouger,
que les péchés de votre précédente naissance
soient brûlés ce soir, dirent-ils.
Que votre souffrance diminue
les infortunes de votre vie prochaine, dirent-ils.
Que le cumul du mal,
compensé dans ce monde irréel
par le cumul du bien,
soit réduit grâce à votre douleur.
Que le poison purifie votre chair
du désir, et votre esprit, de l’ambition,
dirent-ils, et ils s’assirent tout autour
sur le plancher avec ma mère au centre,
la paix indulgente sur chaque visage.
D’autres sucreries, d’autres lanternes, d’autres voisins,
d’autres insectes, et cette pluie interminable.
Ma mère se tordait de douleur
en gémissant sur une natte.
Mon père était là, sceptique, rationaliste,
testant chaque malédiction et chaque bénédiction,
une poudre, une mixture, un mélange d’herbes.
Il versa même un peu de paraffine
sur l’orteil piqué et l’alluma.
J’observai la flamme consumer ma mère.
J’observai le saint homme exécuter ses rites
afin de dompter le poison à l’aide d’une incantation.
Vingt heures après,
il perdit son dard.
Ma mère dit seulement :
Dieu merci, le scorpion m’a choisie
et il a épargné mes enfants.