Attipate Krishnaswami Ramanujan
A River

A River Une rivère
A. K. Ramanujan Traduction : Jyoti Garin
In Madurai,
city of temples and poets,
who sang of cities and temples,
every summer
a river dries to a trickle
in the sand,
baring the sand ribs,
straw and women’s hair
clogging the watergates
at the rusty bars
under the bridges with patches
of repair all over them
the wet stones glistening like sleepy
crocodiles, the dry ones
shaven water-buffaloes lounging in the sun
The poets only sang of the floods.
De Madurai,
ville de temples et de poètes
qui chantèrent les villes et les temples,
chaque été
un fleuve tarit jusqu’à devenir un filet d’eau
dans le sable,
le dénudant jusqu’aux os,
paille et cheveux de femmes
obstruant les écluses
autour des barres rouillées
sous les ponts rafistolés
de partout,
pierres humides scintillant tels de somnolents
crocodiles, au sec
buffles d’eau rasés paressant au soleil…
Les poètes ne chantèrent que les inondations.
He was there for a day
when they had the floods.
People everywhere talked
of the inches rising,
of the precise number of cobbled steps
run over by the water, rising
on the bathing places,
and the way it carried off three village houses,
one pregnant woman
and a couple of cows
named Gopi and Brinda as usual.
Il se trouvait là, pendant une journée
au moment des inondations.
Partout, les gens parlaient
de la montée des eaux en pouces,
du nombre exact des marches en cailloutis
recouvertes par l’eau, montant
jusque sur les lieux des baignades,
et la manière dont elle emporta trois maisons de village,
une femme enceinte
et un couple de vaches
appelées Gopi et Brinda, comme d’habitude.
The new poets still quoted
the old poets, but no one spoke
in verse
of the pregnant woman
drowned, with perhaps twins in her,
kicking at blank walls
even before birth.
Les nouveaux poètes citèrent encore et toujours
les vieux poètes, mais personne n’évoqua
en vers
la femme enceinte
noyée, portant en elle, qui sait, des jumeaux
donnant des coups de pied contre des murs vides
avant même de naître.
He said:
the river has water enough
to be poetic
about only once a year
and then
it carries away
in the first half-hour
three village houses,
a couple of cows
named Gopi and Brinda
and one pregnant woman
expecting identical twins
with no moles on their bodies,
with different coloured diapers
to tell them apart.
Il dit :
le fleuve a assez d’eau
pour être poétique
environ une seule fois par an,
puis
il emporte
dans la première demi-heure
trois maisons de village,
un couple de vaches
appelées Gopi et Brinda,
et une femme enceinte
attendant des jumeaux identiques,
sans grain de beauté sur leurs corps,
aves des couches-culottes de couleur différente
pour bien les distinguer.